Shane Cooper : Moi et l'autre
Arts visuels

Shane Cooper : Moi et l’autre

Reflection de Shane Cooper explore les similitudes entre les êtres, à l’encontre des notions d’individualité si chères à notre société. Serions-nous si facilement remplaçables?

Présentée dans le cadre du programme des artistes invités de la Galerie de l’École d’art d’Ottawa, l’installation interactive multimédia de l’artiste Shane Cooper étudie le langage corporel et embrouille les repères entre les notions d’unicité et de similitude.                

Habitant la Nouvelle-Zélande, Shane Cooper est un ingénieur en logiciel ayant collaboré aux effets spéciaux des films de la trilogie du Seigneur des anneaux et du tout dernier film King Kong produit par les Weta Digital Film Studios de Peter Jackson. Le passage de l’informatique vers l’art interactif s’est effectué naturellement grâce à sa fascination pour les nouvelles technologies. Adolescent, il développait déjà des logiciels appliquant des algorithmes produisant des résultats non prévisibles: "J’ai toujours été captivé par le fait que les ordinateurs peuvent faire des choses qui surprennent même les programmeurs." Ce sont les propriétés d’interactivité et d’inattendu qui passionnent l’artiste. "Il y a aussi une certaine part de danger dans l’interactivité, car on ne peut prévoir la réaction du système ni du visiteur."                      

Qui n’a pas un jour entendu l’hypothèse selon laquelle, à notre ère technologique, le travail de l’être humain pourrait un jour devenir obsolète et être remplacé par un microprocesseur? Pour nous qui voguons sur une mer d’individualisme et qui nous nous enorgueillissons de nos différences, l’installation de Shane Cooper fait vivre une commutation d’une déconcertante simplicité.                     

L’installation Reflection est composée d’une caméra vidéo filmant un visiteur devant circuler lentement à l’intérieur d’un rectangle dessiné au sol. Ces images sont alors analysées et quelques-unes sont par la suite archivées dans une banque de données. Lorsqu’une autre personne traverse l’espace délimité, l’ordinateur substitue brièvement l’image d’un visiteur précédemment conservée correspondant aux mêmes dimensions et positionnements. L’effet est des plus surprenants. La fluidité de la permutation des images générées produit un curieux et subtil enchaînement. Sommes-nous donc tous si semblables, si interchangeables, si prévisibles?

L’installation a été mise en marche lors du vernissage. Tout au long de la soirée, les visiteurs ont pu observer "l’évolution des apprentissages" de l’ordinateur. L’expérience était d’autant plus captivante que la mémoire accumulait rapidement un nombre d’images des personnes présentes de plus en plus grand, devenant d’autant plus efficace et variée. Cooper dit vouloir explorer trois thèmes principaux avec cette installation, soit: l’aspect visuel et notre rapport à l’image corporelle; la mémoire, qui est représentée par les images tirées du passé et archivées; et enfin, la composante réflexive, c’est-à-dire le fait que le système se construise par lui-même, comme un enfant à qui on apprend de nouvelles notions. Évidemment, il ne s’agit pas ici d’intelligence artificielle, car l’analyse des images consiste en la décomposition de l’espace occupé en recherchant les contours de la personne filmée. Il ne s’agit pas non plus d’un système évolutif au sens propre, mais plutôt de la comparaison des modèles ou patterns repérés par l’ordinateur. Quoi qu’il en soit, le dispositif est très convaincant et séduisant.

De nombreux autres projets de l’artiste se retrouvent dans le site Internet www.shanecooper.com.

Jusqu’au 14 novembre
À la Galerie de l’École d’art d’Ottawa
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