Complètement Martel

Chronique à coller sur votre frigo

Cette semaine, un projectionniste m’avouait que, malgré qu’il soit un lecteur régulier de cette chronique, il trouvait depuis quelque temps que je sombrais dans le négatif. Genre, ben du chialage.

C’est une observation que je ne pouvais pas ignorer.

En fait, y a-t-il pire juge que soi-même?

C’est pourquoi je vous livre ici ma chronique la plus positive des derniers mois. Même que je vous suggère de la découper et de la coller sur votre frigo.

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J’aime l’amour. J’aime ça quand les gens s’aiment. J’aime aimer.

Quand j’attends à un feu rouge et que je vois deux adolescents marcher main dans la main, j’aime ça.

Même chose quand j’aperçois un vieux couple qui s’adresse un regard complice, j’aime ça.

Quand je vais chercher mon kid à la garderie et qu’il me saute dessus et que ses yeux sont pleins d’étoiles, j’aime ça.

Quand ma blonde me fait mettre 20 fois sur pause le film qu’on regarde pour me demander des trucs à propos de l’histoire que je ne peux pas savoir parce que, tout comme elle, je ne l’ai pas vu, j’aime ça.

Quand je découvre que finalement, il restait un peu de fromage pour accompagner mes patates chips au barbecue, j’aime ça. Et je sais que ce n’est vraiment pas bon pour mon cholestérol, et surtout, faudrait que je dépose un jour un brevet sur cette invention-là que j’ai baptisée la poutine sèche.

Quand ma blonde me pogne la nuit en train de manger de la poutine sèche et qu’elle me prévient que je vais finir par faire du cholestérol, j’aime ça.

Quand quelqu’un m’appelle pour un sondage et que je réponds à toutes ses questions sans le rusher, j’aime ça. Parce que je sais par expérience que je viens d’aider un étranger à remplir un quota qui lui donne mal au cœur.

Quand je conduis sur l’autoroute et que je prends conscience que je n’ai pas le soleil dans la face, j’aime ça.

J’aime ça aussi quand j’ai le soleil dans la face et que je me rends compte que j’ai des lunettes de soleil sur moi. J’aime ça même si ce sont les pires lunettes de soleil du monde.

J’aime le moment où quelqu’un s’aperçoit qu’il a dit la petite affaire de trop et que là, on sent que ça calcule à la vitesse de la lumière dans sa tête afin qu’il trouve ce qu’il pourrait bien dire pour se rattraper.

J’aime ça déballer un boîtier de jeu vidéo neuf. J’aime encore plus ça déballer une gogosse électronique et me faire croire que je vais lire le manuel au complet avant de m’en servir.

J’aime ça quand mon chum Wellet fait semblant de ne pas être plus intéressé que ça par ce qui se passe dans ma vie.

J’aime ça quand j’entends mon kid partir à rire parce qu’il vient de mettre les lunettes de soleil de ma blonde.

J’aime ça aussi quand Max fait semblant d’être intéressé par ma 43e anecdote de la soirée à propos de mon kid. Mais pas celle-là de mon kid qui est parti à rire parce qu’il avait mis les lunettes de soleil de ma blonde. J’ai quand même encore un peu le sens du punch.

Quand je prends une marche, j’aime ça m’inventer une entrevue où je réponds à plein de questions profondes.

J’aime ça consulter des pages Facebook de personnes décédées. J’en conviens, c’est weird, mais c’est une des façons que j’ai trouvées de mieux dealer avec la mort.

J’aime écouter The Harder They Come de Jimmy Cliff. J’aime encore plus le fait que c’est le seul disque de reggae que j’aime.

J’aime ne pas répondre au téléphone en murmurant à voix basse: «Ne jamais répondre au téléphone.» C’est même pas une joke.

J’aime marcher sur les plaques de sloche à moitié dégelées sur le bord de la rue pour les faire péter. C’est ça le printemps pour moi.

J’aime ça de temps en temps écrire des chroniques où j’utilise le verbe aimer plus de 25 fois.

Enfin, j’aime vraiment ça chialer dans mes chroniques.

On écœure ceux qu’on aime, tsé…