Culture Club

Chère Saint-Valentin, je casse

Chère Saint-Valentin,

Une fois de plus, mon cœur balance. Entre toi et moi, ce n’est plus comme avant. Des fois, même, je pense qu’on devrait se quitter…

Je t’ai aimée pour de vrai, tu sais. On a eu de beaux moments, dans le temps où on partageait les mêmes valeurs d’amour et d’amitié, et que ma couleur préférée était le rose. Mais on dirait que je ne te reconnais plus. Au fond, peut-être que ce n’est pas toi, c’est moi.

Bon, n’exagère tout de même pas, Saint-Valentin, je ne suis pas devenue une célibataire frustrée qui te reproche de tourner le fer dans la plaie, ni une sceptique qui croit que tu as été inventée par Hallmark à des fins commerciales. Mais je ne suis pas non plus de ceux qui suivent la vague et qui font l’amour tous les 14 février, parce que c’est obligé. Tu peux me traiter de vieille cynique si ça te chante, ça ne me dérange pas. Moi, je te répondrai que tu as aussi tes torts, que c’est méchant de laisser croire aux plus faibles que leur popularité sociale est directement proportionnelle au nombre de valentins qu’ils reçoivent.

Et puis je trouve qu’on a évolué différemment. Ton logo de cupidon me semble parfois tellement désuet. On dirait un de ces petits gars potelés tirés d’une peinture de la Renaissance. Et puis quel exemple pour les enfants de voir ce chérubin ailé qui s’exhibe en costume d’Adam avec un équipement de tir à l’arc sur le dos! Arrive en 2012: se promener nu comme un ver en public est aujourd’hui un acte de grossière indécence, surtout avec un carquois rempli d’armes blanches.

Tu fais partie de la culture populaire depuis si longtemps que j’ai l’impression qu’on te tient pour acquise. Surtout les filles romantico-hystériques qui attendent leur chum dans un chemin de pétales de rose, avec une brique pis un fanal, si jamais il a oublié le cadeau. Sors un peu de ta zone de confort, Saint-Valentin! Ça ferait tellement changement si c’était la gent masculine qui devait s’acheter un string en satin à La Senza et qui menaçait de quitter les filles cheap qui ne payent pas la note au resto, tu ne trouves pas?

En fait, Saint-Valentin, j’espère qu’on peut rester amies, car je ne t’oublierai jamais (de toute façon, comment le pourrais-je avec les tablettes des Dollarama qui débordent de trucs en cœur depuis le 26 décembre?). Mais pour l’instant, j’ai envie d’aller voir ailleurs. Cette année, je vais peut-être essayer le 12 février… Ou le 19, tiens!

Sans rancune,

Marjolaine

xxx