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Limoilove

Limoilove
Photo: Stacy-Ann Oliver, dessins: certainement pas Kaël Mercader

Spontanément, et pour bien du monde, le mot Limoilou évoque les mots bouffe, poussette et cégep. Fait : on parle (presque) toujours de Limoilou pour sa Folle Fourchette, sa succursale (aujourd’hui fermée) de Pizzeria Gemini, ses soupes-repas sur la 3e avenue, les tapas japonais des frères Hosaka, la côte de bœuf vieillie du Croc Mignon.

J’élabore pas tellement parce que je sais que les revues montréalaises d’intérêts féminins l’ont déjà fait. Les commerçants gourmands de Limoilou sont de véritables superstars sur la planète foodie. Parce que c’est tellement out d’aller sur St-Jean ou Cartier pour faire les courses. C’est bien connu : faut fuir les touristes pour être de vrais locaux.

(Ici, c’est de l’ironie. Je précise, juste au cas.)

Permettez-moi maintenant d’utiliser un mot passé date. Au rayon popotte, la e-réputation (tiens, une autre expression kitsch!) de Limoilou n’est plus à faire. Idem pour les couples en gestation et en quête du parfait endroit pour élever une p’tite famille.

C’est relativement à la mode d’habiter Limoilou. Parlez-en à Baltrakon qui produit les t-shirt  New York, Londres, Tokyo, Paris, Limoilou. Même Fabienne Larouche a flairé la bonne affaire puisque le prochain personnage principal de 30 vies, c’est une gurda de Limoilou. L’étape supérieure, c’est Dany Bédard qui chante « y’a du monde, aujourd’hui, à Limoilou. » Une référence culturelle douteuse, j’en conviens.

On l’oublie souvent et d’autres l’ignorent, mais Limoilou c’est pas mal plus que ça. C’est (aussi) un terreau fertile pour la création et la diffusion musicale à Québec. En voici la preuve par quatre.

1-Le Bal du Lézard

Ouvert depuis 1985, le Bal du Lézard a toujours fait une place aux artistes de la place et aux musiciens du grand Québec en émergence. Ça, c’est plus de 20 ans avant que Le Cercle n’ouvre ses portes et plus d’une décennie avant l’arrivée de CHYZ sur les ondes hertziennes. Mine de rien, le proprio Alain Slythe était foutrement avant-gardiste.

Jennifer Hardy est aujourd’hui la co-bookeuse de l’endroit et (accessoirement) l’une des très rares femmes à exercer le métier de programmatrice de shows dans la Vieille Capitale. Cette année, c’est elle qui a permis la présentation des concerts de Seb Black, Pif Paf Hangover, Casabon, Sam Éloi, Gazoline, Lubik, Odile Dupont et tout plein d’autres. C’est aussi elle qui a fondé le Festival folk de Limoilou qui en était à sa première édition la semaine passée.

2) La colonie artistique

C’est de notoriété publique, ça fait même partie de son ADN d’artiste. Sylvain Lelièvre est assurément de ceux qui ont le plus fait rayonner Limoilou et bien avant que des restos branchous y élisent domicile. L’épigraphe bleue devant sa maison d’enfance sur la 8e rue en témoigne, tout comme la salle de spectacles du cégep qui porte son nom.

Mais qui sont les auteurs-compositeurs-interprètes qui puisent leur inspiration dans ses rues de nos jours ? D’abord, faut le dire, c’est aussi le hood à Koriass et Safia Nolin.

Nombreux sont ceux qui y naissent et qui choisissent d’y rester. C’est le cas de la quasi totalité des garçons de Mauves, de Webster (né Ali Ndiaye) ainsi que sa sœur Marième, de Jérôme Casabon et des membres du groupe qui porte son nom de famille. Comment faire pour expliquer qu’il y ait autant de talent au pied carré ?

Il y a aussi ceux qui ont décidé de s’y installer pour donner naissance à leurs chansons. La Baie-Comoise Odile Dupont en est et les garçons de l’étiquette de disques P572 aussi. Sans parler de la Beauceronne Émeraude (alias Marie-Renée Grondin) qui y a fait son nid l’an dernier.

3) Limoilou, le film

Fascinante à mort, la scène musicale du quartier servira de trame dans le prochain film du cinéaste local Edgar Fritz qui sortira cet automne. Le long-métrage met d’ailleurs en vedette un animateur de CKRL (Jean-Sébastien Grondin) mais aussi une pléiade de musiciens dont Sam Murdock. Petit scoop : Jane Ehrhardt a fait le don d’une chanson pour la trame sonore officielle.

4) Limoilou en musique

Désireux de se détacher de la Haute Ville mais aussi de faire les choses à sa façon, le secteur Limoilou a son propre carnaval en hiver et son festival indépendant en été. Du 20 au 22 juin, la 3e avenue bloquera les voitures pour faire place aux piétons mélomanes.

Dans le dépliant de programmation, on encercle : les poètes et rockeurs Mauves, les virtuoses de Harfang, les pros du rockabilly de Melvis and The Jive Cats et le grand Keith Kouna.