Anywhere but Here : Maman a raison
Cinéma

Anywhere but Here : Maman a raison

Pas encore des relations mère-fille!!… Eh si! Et on y aura droit tant que Susan Sarandon se spécialisera dans la mamma hollywoodienne. Cette fois-ci, elle incarne une quadragénaire délurée, coincée dans sa petite ville de Bay City, Wisconsin. Ne voulant pas y finir ses jours, elle prend un beau jour son ado sous le bras (Natalie Portman), et file à Los Angeles dans une vieille Mercedes. La mère peut enfin vivre son rêve, mais sa fille ne veut rien savoir, préférant la sécurité du Wisconsin, près de son cousin Benny (Shawn Hatosy). Anywhere but Here, de Wayne Wang, rappelle que les bonnes intentions font souvent de mauvais films. Pourtant, Wang est le réalisateur de The Joy Luck Club, de Chinese Box, et, surtout, de Smoke et de Blue in the Face. Si on est loin des rebelles volutes de fumée, il y a bien, quelque part dans tous ses films, un amour de la famille. Partout, le message est clair: même si c’est compliqué, même si la famille est bancale, vivez ensemble et aimez-vous, le reste n’a que peu d’importance. Après un cri du coeur entre un père et son fils à Brooklyn dans Smoke, voici un paquet de larmes entre une fille et sa mère sous les palmiers de Beverly Hills. Vous avez eu la version urbaine, voici la version plage.
Mais le cynisme est peine perdue. On sait tous que Susan Sarandon est une bonne actrice, qu’elle incarne à merveille les paumées exaltées, celles qui savent être à la fois ringardes, idéalistes, naïves et fonceuses, les Thelma et Louise de ce monde. Maigre et fardée comme une Joan Crawford en déroute, elle n’a rien perdu de son pep, mais ne fait pas dans la dentelle. Elle joue appuyé, elle oublie la finesse de son talent, si fragile pourtant quand son Tim Robbins de mari est derrière la caméra… On sait que Natalie Portman a une grâce indéniable, des yeux troublants de volonté (et de très beaux cheveux quand elle n’a pas les boudins de la reine Amidala). On voit que le duo fonctionne, présent dans presque toutes les scènes, et qu’il supporte vaillamment le film.

Mais on sait aussi de quoi est tricotée ce genre de relation: amour-haine, mère fofolle et fille sérieuse… Qui dirige? Qui supporte? Et malheureusement, on ne nous épargne aucun moyen de nous le faire savoir. Engueulades, vacheries, blessures, réconciliations devant un ice-cream, réconfort mutuel devant la mort, désarroi partagé devant l’électricité coupée et l’amour qui ne vient pas: on a droit à toutes les facettes de la relation jusqu’au message final. Quand vient l’heure de voler de ses propres ailes, il est difficile de quitter une maman, aussi essoufflante soit-elle. Éducation 101. Voici comment agir devant une ado, voici comment aimer votre mère. Parlez-vous au téléphone…

Cynisme, quand tu nous tiens… Pourtant, les images sont propres, le scénario coule avec des répliques parfois cocasses; certains silences et quelques regards sont bien placés; les acteurs ont tous cette véracité nécessaire pour «faire réel», sauf peut-être un flic angelino plus ange gardien que nature. Mais Slums of Beverly Hills d’Alan Arkin avait déjà rempli ce mandat de famille relocalisée, rêvant au code postal 90210, avec originalité et humour. Ici, on sent trop le film qui doit nous indiquer la marche à suivre afin d’éviter les faux pas. Ratissons large, c’est pour l’éducation des masses. Quand le cinéma met ses gros sabots, il faut un soir de grande lassitude pour gober sans broncher…

Voir calendrier
Cinéma exclusivités