My Father's Angel : Le grand pardon
Cinéma

My Father’s Angel : Le grand pardon

Apparemment sorti de nulle part, c’est-à-dire sans battage festivalier ni rumeur médiatique, My Father’s Angel est une des surprises de l’année.

Apparemment sorti de nulle part, c’est-à-dire sans battage festivalier ni rumeur médiatique, My Father’s Angel est un des surprises de l’année. Un film canadien de 1999 qui parle de guerre, du Canada, de tolérance et de haine, sans jamais forcer le trait, ni faire dans la morale ou le flou artistique. Il n’y a pas de miracle: avec un scénario admirablement écrit, des comédiens inspirés, et un cinéaste au regard aiguisé, on peut difficilement se tromper.

La séquence prégénérique montre des victimes de la guerre bosniaque – femmes hurlant de douleur, jeune père pleurant sur son bébé mort dans ses bras, etc. Changement de ton, et l’on se retrouve à Vancouver, où un Bosniaque musulman (Tony Nardi) est tiraillé entre son fils ado (Tygh Runyan), qui fait l’école buissonnière, et sa femme (Asja Pavlovic), qui n’a pas dit un mot depuis qu’elle a été violée pendant six mois par des soldats serbes. À partir de là, My Father’s Angel va de hasards en concours de circonstances qui amèneront cet homme aux abois à être sauvé par un Serbe (Timothy Webber), débarqué au Canada avant la guerre. Celui-ci a également un ado à problèmes (Brendan Fletcher), tandis que sa femme (Lynda Boyd) voue une haine féroce aux musulmans qui ont décimé sa famille. Alors qu’il a choisi Vancouver parce que "c’est la ville le plus à l’ouest de Sarajevo", ce pacifiste, rattrapé par une Histoire qu’il a tenté de fuir, doit faire face au "poison" qui est arrivé dans sa maison…

Le scénario de Frank Borg est remarquablement précis, économe et équilibré, faisant vivre pleinement tous ces personnages, sans en faire des tranches d’histoire. Le film qu’en a tiré Davor Marjanovic est de ceux qui bouleversent peu à peu. Ayant réalisé plusieurs documentaires et deux films de fiction, le cinéaste filme sans effets un drame intime en lui donnant l’ampleur d’un réquisitoire. Se permettant de petits détours vers l’humour, My Father’s Angel décrit le cercle vicieux de la haine, qui se transmet d’une génération à l’autre, et l’énergie, la raison, l’humanité nécessaires pour sortir de cette spirale. Dans le rôle écrasant d’un homme qui en a trop vu, mais qui garde espoir, Tony Nardi est bouleversant, dominant une distribution impeccable. Et on se demande pourquoi on ne voit pas plus souvent, dans des films québécois, l’interprète de La Sarrazine et de La Déroute

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