Pleure pas, Germaine : Se perdre en route
Cinéma

Pleure pas, Germaine : Se perdre en route

Ce doit être plutôt agréable pour un auteur de voir vivre ses personnages sur grand écran, plus de 30 ans après l’écriture du roman. Un petit velours… C’est ce qui arrive à Claude Jasmin en regardant sa Germaine. Mais Germaine n’est plus ni grassouillette ni rousse, elle est brune, sèche et  catalane.

Ce doit être plutôt agréable pour un auteur de voir vivre ses personnages sur grand écran, plus de 30 ans après l’écriture du roman. Un petit velours… C’est ce qui arrive à Claude Jasmin en regardant sa Germaine. Mais Germaine n’est plus ni grassouillette ni rousse, elle est brune, sèche et catalane. Pleure pas, Germaine, ce road novel de l’écriture joual de 1965, roman de la misère des villes et des champs, a été transposé à l’écran par un jeune Belge, Alain de Halleux. On comprend que le défi était tentant, mais c’était aussi à haut risque.

Gilles et Germaine Bédard, c’est une entité vive, celle de l’amour qui cimente les solitudes entre elles, celle de la famille malgré tout: la misère, le chômage, la mort bizarre de la fille aînée, quatre enfants, et l’envie de Germaine de retourner dans sa Gaspésie natale. C’est là-bas qu’un père pourra faire le deuil de sa fille. Entre les deux, c’est la vie qui se trimballe et qui pue comme le cadavre du chien que l’on traîne dans la remorque. Le troublant de ce genre d’histoire est dans le style, dans ce coeur qui bat entre les lignes. Et ces palpitations bien personnelles ont disparu dans la version filmée, aussi plate qu’un téléfilm. Si convenue que cela en est navrant. Bien sûr, l’adaptation tient le coup: Germaine (Rosa Renom) est espagnole, elle veut retourner dans les Pyrénées; et Gilles (Dirk Roofthooft) est flamand et flanc mou. Le reste est universel.

Mais ici rien ne décolle ni n’émeut. Tellement attendues, les engueulades parentales, les crises d’ado des plus grands, la fausse insouciance si mal jouée des jumeaux. Pour rendre la misère poétique et émouvante, il ne suffit pas d’avoir une camionnette jaune, une cape de Zorro sur les épaules du petit, et une famille qui fait des clowneries sur les routes montagnardes. Voici de bons acteurs laissés à eux-mêmes, avec des dialogues plats sur une mise en scène si linéaire et candide qu’ils ont plus l’air d’abrutis que d’autre chose. Dommage, le père était de la distribution de Rosie, un film belge autrement plus fort sur la pauvreté. Tandis que de l’émotion du roman de Jasmin, il ne reste rien.

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