Just Visiting : Visite guidée
Cinéma

Just Visiting : Visite guidée

L’appât du gain mène vraiment les gens n’importe où. Dans les oubliettes serait la meilleure place pour cette troisième mouture des Visiteurs. On s’en doutait un peu, mais l’exercice de la comparaison est édifiant.

L’appât du gain mène vraiment les gens n’importe où. Dans les oubliettes serait la meilleure place pour cette troisième mouture des Visiteurs. On s’en doutait un peu, mais l’exercice de la comparaison est édifiant. Petit récapitulatif: en 1993, le réalisateur Jean-Marie Poiré (Le père Noël est une ordure) lance Les Visiteurs, film-culte européen que l’on connaît. Sûr du succès, Poiré le parachute aux États-Unis, où il se plante illico. Avec Les Visiteurs II, il réitère le succès maison, mais garde toujours en tête le marché US. Aidé de Christian Clavier, aussi scénariste du film, il finit donc par adapter la formule pour les Yankees. Et cela donne Just Visiting. Mauvais? Oui et non. Non: car pour un public averti, celui qui connaît par coeur les mimiques de Clavier, les gags de se laver les mains dans les toilettes ou de bousiller une voiture à coups de masse, cela reste assez rigolo de voir les deux compères se parodier en langue anglaise. Et ce, même s’ils le font mal, et sans aucun entrain. Des scènes entières ont été littéralement transposées et les fans peuvent s’amuser, au second degré, de l’adaptation.

Mais dans l’ensemble, le résultat reste assez nul, et particulièrement lèche-botte. Jean-Marie Poiré prend le surnom de Jean-Marie Gaubert, Jean Reno/Godefroy de Montmirail devient Count Thibault, et Clavier ne s’appelle plus Jacquouille, mais André. Ils se perdent encore dans les couloirs du temps, à cause de la potion dégueulasse d’un sorcier (désolant Malcolm MacDowell). Et boum! Ils débarquent dans le Chicago d’aujourd’hui. Et boum! Toutes les finesses du langage et le jeu des codes sociaux partent en fumée. Just Visiting n’est plus qu’une grosse boursouflure qui doit suivre un rythme endiablé, "à l’américaine", gommant toutes les aspérités sur son passage: les personnages secondaires, si savoureux dans Les Visiteurs; les nuances sociales franchouillardes (une noble mariée à un bourgeois, une mendiante et un parvenu); les dents trop sales des deux sbires; et une employée de maison fantaisiste et granole jugée plus présentable qu’une clocharde très vulgaire. Ainsi, la noblesse américaine prend les traits d’une blondinette WASP (Christina Applegate), sans aucune commune mesure avec Valérie Lemercier. En enlevant toute la chair cocorico, il reste la structure comique surréaliste: il faudra maintenant voir si celle-là est satisfaisante pour les friands d’humour à la Farrelly et les mordus d’élucubrations visuelles façon Men in Black. Petit détail pour le public nonaméricain: les lois de la transposition mettent en valeur un bien vilain défaut. On se moque de la fantaisie romantique des Britanniques (le sorcier); et si les deux moyenâgeux se comportent comme des porcs, la raison est clairement expliquée: ils sont français. Charmant.

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