Nowhere to Hide : La totale
Cinéma

Nowhere to Hide : La totale

Joong-Hoon Park a une gueule impossible. Taillé comme une armoire à glace, c’est le genre de colosse avec qui on hésiterait à partager un ascenseur. On se dit qu’on a affaire à un casseur de jambes. Pas du tout, c’est un flic.

Joong-Hoon Park a une gueule impossible. Taillé comme une armoire à glace, c’est le genre de colosse avec qui on hésiterait à partager un ascenseur. On se dit qu’on a affaire à un casseur de jambes. Pas du tout, c’est un flic. On est alors rassuré de constater que les forces de l’ordre coréennes comptent pareil phénomène. Si l’inspecteur Woo joue quand même très souvent du poing, c’est qu’il est quelque peu désabusé de la vie. Une sorte d’inspecteur Harry coincé dans un corps de sumo. L’approche policée, ce n’est pas son genre. L’inspecteur Woo déboîte les mâchoires et pose ensuite les questions. Et comme tout détective qui se respecte, il a une intrigue sur les bras.

Un baron de la drogue s’est fait descendre (au ralenti sur Holiday, super hit des Bee Gees). L’enquête s’applique à remonter la filière grâce à une structure narrative à relais, où chaque suspect renvoie la balle à un autre plus compromettant. Si l’intrigue se résume en deux lignes, l’esthétique, quant à elle, témoigne d’une richesse ahurissante.

L’homme derrière ce pur délire qu’est Nowhere to Hide se nomme Myung-Se Lee, un réalisteur sud-coréen qui semble avoir digéré toutes les images de films d’action que le cinéma puisse compter. Du muet (gros plans de visages grimaçant de douleur) au cinéma actuel, ses citations sont multiples: film noir, western, burlesque (des empreintes d’espadrilles sur les visages des suspects, au terme des interrogatoires musclés). S’ajoutent à cela des clins d’oeil à la photo (certaines scènes ne sont décrites que par un amoncellement de clichés), à l’animation et à la bande dessinée.

Tel un revendeur de montres, Lee ouvre son imperméable et, sous nos yeux incrédules, fait étalage de sa marchandise. Il revisite John Woo, Johnnie To, Takeshi Kitano et Wong Kar-Wai sans jamais donner l’impression de les plagier. Avec ce qu’on peut désormais désigner comme une esthétique asiatique de la violence, Lee multiplie les ralentis et chorégraphie ses duels comme un ballet classique, sur la musique… heavy métal (!). Mais, curieusement, très peu de sang gicle. Les décharges d’hémoglobine semblent d’une autre époque.

Cela dit, malgré les audaces stylistiques, Nowhere to Hide a du mal à se défaire de cet effet de morcellement qui résulte d’une mise en scène hachurée, voire mécanique. C’est une oeuvre baroque pour génération zapping.

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