Chasing Sleep : Le grand sommeil
Cinéma

Chasing Sleep : Le grand sommeil

Projeté il y a quelques semaines dans une salle bondée, lors du festival Fantasia, Chasing Sleep a aussi gagné le prix spécial du jury de Gérardmer cette année. Bref, un petit délire d’insomniaques qui se prend bien…

On ne boudera pas, même si le film a été parachuté à la dernière minute dans une salle montréalaise: aux États-Unis, la vie de Chasing Sleep se passe uniquement sur le comptoir vidéo. Or, le voilà ici sur grand écran. Projeté il y a quelques semaines dans une salle bondée, lors du festival Fantasia, Chasing Sleep a aussi gagné le prix spécial du jury de Gérardmer cette année. Bref, un petit délire d’insomniaques qui se prend bien…

Chasing Sleep est le premier film de quelqu’un ayant beaucoup aimé Répulsion, de Polanski, et qui nage comme un poisson dans les ambiances glauques de monsieur Lynch. Mais cela reste une oeuvre au rythme personnel, qui, loin d’être affolante et parfaite, balance une bonne dose de bizarreries badigeonnées au gore… Ed (Jeff Daniels) est un professeur d’anglais qui se réveille en pleine nuit pour s’apercevoir que sa femme est absente. Il est trois heures du matin et il est inquiet. Il appelle une amie, puis téléphone aux flics. Pas de nouvelles. Tout le monde, docteur (Zach Grenier), policiers (Ben Shenkman et Gil Bellows), et étudiante de type oie blanche (Emily Bergl) sont très compréhensifs à son égard; mais Ed commence sérieusement à perdre les pédales. Ses cernes se creusent, il n’arrive pas à dormir, et il est de plus en hagard. Et sa maison fait de drôles de bruits. Sans parler des apparitions… Le début de l’histoire serait personnelle: Michael Walker, le réalisateur, aurait attendu sa dulcinée en pleine nuit, et la conversation avec la police est un verbatim. Ce qui se déroule après est une autre histoire…

Une intrigue qui importe peu d’ailleurs; car on comprend rapidement que la dame n’est peut-être pas retournée chez sa mère. Tout est dans l’ambiance, composée d’un ton très calme, qui dégénère avec lenteur, et ponctuée par les visites faites à Ed qui, chaque fois, ouvre sa porte avec une gueule de plus en plus cadavérique. On passe, tout doucement, du badin au malsain.

La maison devient Ed, et Ed devient dingo comme sa maison. Les canalisations fuient, la toilette se bouche, et le sous-sol est aussi vivant qu’une salle des machines: on souffre ici d’un sérieux problème de plomberie. Les bruits sont efficaces, bien plus que les visions ensanglantées qui sortent de la salle de bain. Là-dedans, Jeff Daniels est bien loin des âneries de Dumb and Dumber. Comme Glenn Ford ou Jack Lemmon avant lui, il a cette gueule du monsieur Tout-le-Monde inoffensif qui peut devenir inquiétant en un clin d’oeil, voire dément. Daniels emplit cette maison de ce physique ordinaire, et laisse planer sa folie avec un naturel, et parfois un humour, qui tombe pile. Si parfois la lenteur s’apesantit sur des scènes qui ne font que diluer la sauce; les montées d’escalier, les balades dans la cave et les errances dans cette chambre au plafond de nuages nous gardent bien accrochés au coeur d’un thriller qui flirte avec les soucis d’un psychopathe…

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