Les Autres Filles : Je suis timide mais je me soigne
Cinéma

Les Autres Filles : Je suis timide mais je me soigne

Ah, l’adolescence! Âge ingrat. L’âge des boursouflures existentielles et des grands travaux identitaires. L’âge où, l’oeil peiné et le dos voûté, on avance sur le chemin des incompris, convaincu que tout le monde et son frère sont contre  nous.

Ah, l’adolescence! Âge ingrat. L’âge des boursouflures existentielles et des grands travaux identitaires. L’âge où, l’oeil peiné et le dos voûté, on avance sur le chemin des incompris, convaincu que tout le monde et son frère sont contre nous. Imaginez un peu le drame lorsque, l’allure un peu garçonne, on constate l’étendue de la divergence avec ses copines qui scintillent de mille feux. C’est le destin de Solange, de Toulouse (Julie Leclerq, aussi mal à l’aise devant la caméra qu’une adolescente devant la vie, ce qui, par conséquent, rend son jeu assez crédible).

Dans le lycée professionnel où elle apprend à rouler des bigoudis (sous la supervision docile d’un Bernard Menez), elle traîne péniblement son pucelage comme d’autres traînent un sac de sable. La vie est dure pour elle, alors qu’elle frôle ses 16 ans sans que personne n’ait frôlé ses rondeurs. Rapidement, la question se transforme en une préoccupation à temps plein. Une souffrance qui se vit en solitaire car il n’est pas question d’afficher son retard. Alors, elle feint les femmes épanouies et déclare son passé rempli de conquêtes. Et puis, comme toute adolescente qui se respecte, elle a la communication malaisée avec ses parents malgré le regard affectueux d’un père (Jean-François Gallotte), éleveur d’autruches, et d’une mère, vaguement cocotte (Caroline Baehr).

Les Autres Filles, de Caroline Vignal, fait dans l’introspection psychologique. On se cherche des poux et, on travaille intensivement à les écraser. Une démarche au parfum autobiographique qui semble avoir soulagé son auteur: "Lorsque j’ai commencé à travailler sur le scénario, c’était quelque chose d’encore très vivant en moi. J’avais 26 ans et j’étais toujours dans une problématique adolescente. J’ai abordé ce sujet pour régler certaines choses qui m’empêchaient d’avancer."

Il faut dire que Vignal, dont c’est le premier long métrage, avait déjà démontré par ses courts un intérêt soutenu pour les problématiques du beau sexe, avec une prédilection pour la difficulté à vivre le quotidien. Avec Les Autres Filles, elle attaque son sujet par la racine: la genèse de l’identité féminine. Et l’école de coiffure s’y prêtait à merveille: "On y transforme les jeunes filles en de véritables caricatures de femmes." Si Solange a du mal, ses copines, toutes apprenties coiffeuses décoincées, ne lésinent, quant à elles, ni sur le cintré ni sur le décolleté.

On a beau apprendre que Vignal fut formée en scénarisation, on a du mal à observer une véritable audace dans l’exercice de ce premier film qui se cantonne trop souvent dans les conventions. Malgré un effort notable pour diversifier le tableau et nourrir le réalisme (chronique provinciale, visages bigarrés, réalités d’émigrés), il demeure une impression tenace de déjà-vu (et vu mieux que ça, essentiellement chez Catherine Breillat). En ce sens, la mise en scène de Vignal n’aide pas du tout, tant les répliques platement lâchées sont relayées par des mouvements de caméra scolaires et une esthétique pauvre. C’est l’histoire gentillette d’une jeune fille qui se cherche et qui finit par se trouver.

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