Rebelle : La petite fille à la kalachnikov
Cinéma

Rebelle : La petite fille à la kalachnikov

Quatrième long métrage de Kim Nguyen, Rebelle illustre le quotidien d’une fillette soldate en Afrique subsaharienne.

Présenté en compétition au Festival de Berlin, où l’actrice congolaise Rachel Mwanza a remporté le Lion d’argent d’interprétation féminine, Rebelle est le deuxième film que Kim Nguyen tourne en Afrique. Si l’on devine qu’il a été tourné au Congo en raison de la mine de coltan, minerai utilisé dans la fabrication de téléphones portables, le réalisateur ne dévoile pas l’identité du pays dans le récit.

"Je ne voulais pas stigmatiser un pays en particulier, explique-t-il. La conjoncture change si rapidement. Le fait que le gouvernement congolais nous ait permis de faire un film sur les enfants soldats, c’est un pas dans la bonne voie. On a pu y faire le film dans la mesure où on ne nommait pas le pays. Je ne sais pas pourquoi, tous mes films sont comme ça. Aussi, je ne suis pas fasciné par l’Afrique en particulier, je cherche les bonnes histoires."

Interprétée par Rachel Mwanza, Komona est une adolescente de 14 ans qui raconte à l’enfant qu’elle porte comment elle est devenue fillette soldate à 12 ans: "Le plus important pour moi, c’était de ne pas faire un film sur les enfants soldats, mais plutôt un film sur une fille dont l’une des réalités est celle des enfants soldats. Je souhaitais rendre hommage à une enfant africaine qui vivrait une odyssée, qui serait capable de rire, de vivre, de faire preuve de résilience, de prendre son destin en main, par les choses qu’elle vit, mais aussi par la richesse de sa vie de tous les jours."

Quiconque s’étant intéressé au sort des enfants soldats sait que ceux-ci vivent un destin hors du commun où la violence est leur lot quotidien. Ainsi, lorsque Komona est enlevée par des soldats rebelles, celle-ci est forcée d’abattre ses parents sous peine d’être elle-même tuée à coups de machette. Plus tard, elle deviendra l’esclave sexuelle du Grand Tigre Royal (Mizinga Mwinga).

"On est descendu de deux coches dans la violence. C’est une forme de paternalisme que de considérer que la pire situation est la généralité. Il y a des enfants soldats qui s’enrôlent d’eux-mêmes, certains parce qu’ils n’ont rien à manger; aux États-Unis, on peut s’enrôler dans l’armée dès 17 ans. La réalité est beaucoup plus diversifiée que ce que l’on croit. Ce n’est pas toutes les filles qui se font violer. On se réconforte dans la violence maximale. Je voulais trouver une zone un peu plus intermédiaire, m’éloigner du misérabilisme et montrer la résilience."

Bien qu’il y ait des scènes très éprouvantes, Rebelle comporte des moments d’onirisme, de lyrisme, telles ces rencontres entre Komona, sous l’effet d’une sève toxique, et les spectres de ses parents: "Ce n’est pas un film objectif comme Johnny Mad Dog de Jean-Stéphane Sauvaire. On a besoin d’un autre point de vue pour nourrir l’objectivité. Je voulais trouver un processus nous permettant de comprendre émotionnellement comment se sent l’enfant soldat. Lorsqu’il tue, il ne voit pas la violence, il est comme brouillé par la drogue. Les fantômes représentent donc le masque qui nous permet d’accepter la violence."

En salle le 20 avril