Mr. Turner : Sombre lumière
Cinéma

Mr. Turner : Sombre lumière

Mike Leigh dirige Timothy Spall qui se glisse dans la peau du peintre J.M.W. Turner dans ce biopic lumineux mais ennuyant.

Nouveau long métrage de Mike Leigh (Another Year, Happy-Go-Lucky), Mr. Turner revient sur les dernières années de vie du grand peintre britannique J.M.W. Turner (Timothy Spall) qui vécut de 1775 à 1851. Entouré de son père (Paul Jesson) et de sa fidèle gouvernante (Dorothy Atkinson) et reconnu autant par le public que par la Royal Academy of Arts, Turner vit somme toute heureux, entre son atelier et les nombreux voyages qui l’inspirent.

Le peintre de la lumière est toutefois bourru et assez solitaire, malgré une complicité palpable avec son père et quelques amis. Il fréquente l’aristocratie, où il est bien reçu, il visite les bordels pour assouvir ses pulsions et se nourrit de ses voyages pour créer ses toiles puissantes. Malgré tout, il subit parfois les railleries du public et les sarcasmes de ses collègues.

C’est suite à la mort de son père que Turner entreprend de s’isoler, devenant plus taciturne avec le temps. Il n’entretient pas de relations avec ses filles et leur mère, profite de sa gouvernante Hannah, grogne, râcle et râle de plus en plus, et tombe finalement sous le charme de Mme Booth (Marion Bailey), propriétaire d’une pension de famille en bord de mer, avec une vue magnifique qui inspira Turner. C’est avec elle qu’il vivra les dernières années de sa vie en toute discrétion, dans une maison à Chelsea, après qu’elle eut vendu sa pension où Turner venait créer.

Alors que l’aspect historique du film de Mike Leigh impressionne, tant par sa recherche que par l’impression qu’elle laisse au spectateur, Mr. Turner, au final, reste un long biopic de 2h30, sans réelle trame narrative outre l’évolution vers la mort de Turner. Si on finit par s’ennuyer à force de voir Turner aller d’une femme à une autre, aller et revenir à Margate – où il rencontre Mme Booth -, quelques bonnes idées ressortent du lot. À preuve, l’exploration par Turner du daguerréotype manoeuvré par John Mayall tombe plutôt à plat, alors qu’il serait judicieux de creuser le tout puisque ce nouvel appareil sonne le glas d’une certaine conception de l’art pour Turner.

Il faut cependant souligner la direction photographique de Dick Pope qui parvient à créer un jeu de lumière tout au long du film, rappelant le talent de Turner pour capter les tons ensoleillée, nuageux, ou encore la brunante et l’aube. En combinant la direction photo et la recherche historique, on découvre un film majestueux.

Par contre, on remarque aisément que le film aurait gagné à être plus resserré dans son montage, plus structuré. On se retrouve malheureusement avec un étalage parfois décousu de la vie de Turner, sans que l’on puisse mettre le doigt sur un fil conducteur ou une orchestration quelconque. Son rapport parfois tordu avec l’Académie royale des arts aurait pu être creusé davantage ou encore l’importance de ses relations avec les femmes de sa vie, ou enfin – et surtout – son processus créatif lui-même qui gagne à être connu et exploré. Malheureusement, autant le peintre lui-même peut être fascinant, autant le film est lassant, malgré une recherche historique pointue et des images lumineuses et subtiles.

En salle le 25 décembre