BloguesDenis McCready

La porte ouverte

Depuis l’enfance, on nous inculque des principes universels : ne pas voler, ne pas tricher à l’école, ne pas faire de mal aux autres. Certains sont intégrés tellement profondément qu’on ne peut pas imaginer faire autrement.

D’autres principes font leur chemin dans la société depuis plusieurs années. Parfois complexes à comprendre et à transmettre à autrui, ils finissent néanmoins par être assimilés au fil du temps.

Le principe de précaution en environnement.

Le principe du commerce équitable.

Le principe de la vérification des faits sur les médias sociaux.

Les hommes qui agressent physiquement les femmes (violence physique et/ou un viol), ne peuvent prétexter l’ignorance. Nul n’est devenu adulte en étant à ce point isolé du monde qu’on ne lui ait jamais dit : « Heille le jeune, tu ne peux pas toucher à une femme si elle ne veut pas. »

Nous sommes toutes et tous sont interpellé-es par l’affaire Gomeshi et par la vague nécessaire de révélations sur les agressions dont trop de femmes sont victimes. L’iceberg sort de l’eau et nous montre sa taille gigantesque. Notre société est malade de la violence faite aux femmes.

Les hommes qui n’ont rien à se reprocher vont forcément se questionner. C’est nécessaire et sain de faire un examen de conscience. La question qui nous trotte tous dans la tête est simple : aie-je déjà agressé une femme? Je ne crois pas que nous soyons capables de passer en revue toutes nos interactions avec les femmes pour dresser un bilan objectif de nos moments ambigus sans avoir en main des outils, une méthode, voire même de l’aide d’une personne compétente.

La mémoire humaine est faillible, nos perceptions évoluent et dérivent parfois. Souvent, si nous comparons nos souvenirs avec l’autre, on se rend compte qu’on a abouti à deux interprétations différentes. Parce qu’il y a une grande zone floue, une zone grise, et comme Patrick Lagacé le disait si bien, « Parce que c’est compliqué ? »

Dans le cas d’agression physique et/ou de viol, même si c’est difficile, il vaut mieux porter plainte. (Voir l’article de Léa Clermont-Dion suite à sa dénonciation : #AgressionNonDénoncée: Portez plainte ) Même imparfait, le système judiciaire peut mettre un terme à l’impunité d’un agresseur et empêcher d’autres victimes.

Mais que faire dans les autres situations? Les zones où c’est flou, où c’est « compliqué »?

Il y a un principe que j’aimerais proposer aux hommes afin de nous aider à naviguer nos rapports avec les femmes, afin d’éviter de tomber dans le flou où les choses peuvent déraper, même quand on a les plus nobles intentions.

C’est le principe de la porte ouverte.

En droit de la personne, il y a un principe simple: tout encadrement ou entrave, même modeste, à l’expression d’un droit constitue une atteinte à ce droit. Il s’applique autant aux droits qu’aux femmes.

Si un homme approche une femme et qu’il s’assure de ne jamais l’enfermer dans une situation où il n’y a pas de portes ouvertes – au sens propre et au sens figuré – elle saura qu’elle a le choix de continuer ou de mettre un terme à ce qui se passe. Ça s’applique autant à une première conversation, à un premier baiser qu’aux moments les plus intimes dans la sexualité.

Nous devons toujours agir avec les femmes en laissant la porte ouverte.

Je. Tu. Il. Nous. Vous. Ils. Les hommes.

Il nous faut lire les réactions des femmes et agir en conséquence pour ne pas déraper et commettre une (autre ?) agression. Ce n’est pas un remède miracle, mais si ça peut contribuer à diminuer le nombre d’agressions dans la zone grise, si ça peut permettre un climat plus sain de cohabitation, ça serait une grande amélioration.

Nous avons du chemin à faire comme société. Nous sommes rendus là. Il est temps de soigner notre société malade de la violence faite aux femmes, parce que cette violence fait plus de victimes que le terrorisme et Ebola. Chaque jour. Autour de nous. Et ça ne demande pas de vaccins ou d’armes de destruction massive. Il faut se parler. Maintenant.

* * *

Un ami et moi en avons discuté longuement aujourd’hui et il m’a confié qu’il n’en peut plus de cette violence faite aux femmes, ni du silence des hommes. Je suis du même avis. Il est temps que les hommes interpellent les hommes. Nous ne pouvons plus garder le silence. Nous allons donc travailler sur un texte que je publierai ici la semaine prochaine.