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La démocratie un sac de patates à la fois

À tous ces privilégiés qui votent masqués, fiers d’avoir accompli un geste politique de haute voltige. Ils ont plié leurs foulards la veille, ils ont repassé leurs tissus, vidé les patates de leurs sacs de patates, ils avaient le tracas fébrile de l’avant-guerre.

Ils se sont levés ce matin, motivés comme Castro avant son putsch, nerveux comme Churchill avant ses discours. Ils ont affûté leurs caméras et les voilà partis en croisade. Contre qui? Je ne sais trop. Quelques femmes voilées, tsé, les mêmes qui sont les moins privilégiées dans notre société. Mais ça, c’est pas important. L’important, c’est qu’icitte on vote le visage à découvert, donc pour protester, couvrons nous le visage. LOGIQUE.

De vrais Che Guevara. Ils attendaient ce moment depuis longtemps, s’excitaient entre eux, ils avaient hâte non pas de voter, mais de voter masqués. Voyez-vous la différence? Ce n’est pas de la démocratie, c’est du fétichisme. Si au moins ils pouvaient rester anonymes, mais non. Ils sont bien trop bandés, il faut absolument qu’ils exhibent leurs prouesses de guerres sur les médias sociaux. « Regarde chéri, j’ai mis un niqab bidon acheté dans un souk en Tunisie hihihi ».

Instrumentalisés? Victimes du politique? Sont-ils les pions que l’on avance sur un échiquier? Non, vous diraient-ils, ils sont en pleine possession de leurs moyens. Ils exercent leurs droits! Ils sont les défenseurs des valeurs de notre nation.

Ô héros, sachez, ô grands révolutionnaires, cowboys des temps modernes, que les anthropologues ressortiront ces photos, que les historiens vous pointeront sur un Powerpoint en 2084 à leurs élèves, et ils diront : « voici ceux qui ont permis la réélection d’un gouvernement conservateur, voici chers élèves pourquoi le ciel est brun et que les nuages crachent de l’acide ». Je sais, j’exagère à peine.

P.-s: Toutes les photos ont été prises via Facebook sur la page révolutionnaire nommée «Le 19 octobre, je vote voilée».

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