BloguesLe voisin

Harper contre le parlement

La journaliste et chroniqueuse Manon Cornellier du journal Le Devoir est une des critiques les plus éclairées de la gouverne de Stephen Harper (1). Avec sa collègue Hélène Buzetti, elle a mis en relief à plusieurs reprises le mépris du premier ministre canadien actuel envers les grands principes de la démocratie en général et à l’égard des règles fondamentales du parlementarisme en particulier.

Dernièrement, ce sont les projets de loi omnibus (qualifiés par le gouvernement de projets de mises en œuvre budgétaire ou par l’opposition de projets de loi mammouth étant donné l’ampleur de ceux-ci) qui semblent devenir la façon détournée pour ce gouvernement de contourner la fonction de critique et de contrôle de l’activité gouvernementale des parlementaires…

Car si vous lisez un peu sur la question depuis que les conservateurs sont au pouvoir (2006), tous les feux sont au rouge en ce qui concerne les rapports que Stephen Harper entretient avec le Parlement. Le Canada fonctionne pourtant sur la base du système parlementaire de type britannique. Le parlement devrait donc être le pouvoir central dans notre système politique, le lieu par excellence de surveillance et de contrôle du gouvernement; le détenteur de la «souveraineté» et le lieu d’émanation de la volonté populaire.

Or, Stephen Harper méprise cette institution: il proroge les travaux du parlement lorsqu’un vote de confiance risque de le faire tomber (2008); il ment effrontément aux députés et aux comités parlementaires qui le questionnent; il cache des informations au directeur parlementaire du budget, il falsifie des documents (vous vous rappelez de la ministre Bev Oda et de sa subvention retirée à l’organisme Kairos?); il réprime les personnalités et organismes qui ne pensent pas comme lui (je pense ici à la crise à Droits et démocratie ou à l’ex-ambassadeur du Canada en Afghanistan ou à l’ancienne dirigeante d’énergie atomique du Canada, qui ont tous été attaqués sans vergogne par le gouvernement Harper pour avoir contredit le discours gouvernemental), etc. Et quoi encore?

La dernière dérive anti-démocratique de Harper se situe dans sa nouvelle habitude à présenter des giga-projets de loi comportant une multitude de mesures sans rapports les unes avec les autres. Cela compromet la capacité des parlementaires de débattre sereinement de projets soumis au parlement en plus de forcer une polarisation du débat: car on peut être favorable aux modifications relatives au fonds de pension des députés sans vouloir modifier les procédures d’évaluation environnementales qui font partie du même projet… On comprend donc que le gouvernement Harper, par cette tactique, empêche un réel débat et torpille la fonction fondamentale du parlement.

Le gouvernement Harper constitue donc une menace à notre système démocratique parce qu’il opère un travail de sape et d’affaiblissement des différents contre-pouvoir existants dans un régime parlementaire.

Comme les libéraux de Jean Charest ont été mis sur le banc des punitions, il serait maintenant temps que l’on déplace notre indignation vers Ottawa, car qu’on le veuille ou non, ce gouvernement façonne encore notre société. Et je ne dirais pas que c’est pour le mieux…

_________________________

(1) Lisez aussi la lettre du ministre conservateur Maxime Bernier et la réplique de Manon Cornellier…