Yves Lavertu et Jean-Charles Harvey : Jean-Charles Harvey, Le Combattant et La Peur
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Yves Lavertu et Jean-Charles Harvey : Jean-Charles Harvey, Le Combattant et La Peur

Jean-Charles Harvey est un écrivain encore bien méconnu. Avec Jean-Charles Harvey, Le Combattant, Yves Lavertu comble en partie ce trou béant dans la culture québécoise du XXe siècle.

Jean-Charles Harvey est un écrivain encore bien méconnu. Avec Jean-Charles Harvey, Le Combattant, Yves Lavertu comble en partie ce trou béant dans la culture québécoise du XXe siècle.
Les quatre cents pages de cette biographie ne couvrent cependant qu’une douzaine des 75 années qu’aura duré la vie de Jean-Charles Harvey: né dans Charlevoix en 1891, il devait mourir à Montréal en 1967. Le livre s’ouvre en 1934, au moment où Harvey publie Les Demi-civilisés, un roman qui sera aussitôt interdit par les autorités ecclésiastiques.
Quittant la ville de Québec, Harvey se retrouve à Montréal en 1936 où il côtoie, entre autres, un certain docteur Bethune et les sympathisants communistes qui iront soutenir en Espagne les Républicains qui se battent contre Franco. En 1937, il fonde Le Jour, un journal qui sera pratiquement la seule voix anticonformiste à se faire entendre au Québec, tandis que la Seconde Guerre mondiale ravage l’Europe. L’aventure durera huit ans, jusqu’à ce que le clergé, encore une fois, réussisse à faire taire Harvey et ses collaborateurs.
Jean-Charles Harvey, Le Combattant aurait pu tout aussi bien s’intituler «Harvey à la barre du Jour». Yves Lavertu retrace en détail une décennie de lutte contre les préjugés et les idées reçues. Accusé, entre autres par Le Devoir, de diriger un journal à la solde des juifs, Harvey se débattra comme un petit diable d’intellectuel libéral dans l’eau bénite pour combattre le fascisme larvé qui règne dans le Québec du tournant des années trente et quarante.
À une époque où à peu près tout le monde avait des soutanes dans les idées, Jean-Charles Harvey a été l’un des rares à se rebeller contre l’étroitesse d’esprit. Le fait que l’homme et son oeuvre ne soient pas encore complètement sortis de l’oubli a quelque chose de très troublant. Est-ce parce qu’il nous est difficile d’accepter qu’un homme qui a refusé d’être un porte-étendard du nationalisme puisse être malgré tout l’une des grandes figures de la vie intellectuele québécoise? Ou est-ce parce qu’entre son époque et la nôtre, la société québécoise n’a peut-être pas changé autant qu’on voudrait le croire?
La publication de la biographie d’Yves Lavertu et la réédition de La Peur (une conférence de Jean-Charles Harvey prononcée en 1945 et à mettre au même rayon que Refus global) contribueront éventuellement à changer les choses. Éd. du Boréal, 2000, 462 p./Éd. du Boréal, coll. Boréal Compact, 2000, 63 p.