Marc Séguin : Hollywood
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Marc Séguin : Hollywood

En 2009, Marc Séguin en étonnait plus d’un en publiant un roman, La foi du braconnier. Un livre convaincant, qui explorait entre autres la relation de l’être humain avec la nature et ses cycles, et qui avait mérité à l’auteur le Prix littéraire des collégiens. Le réputé peintre envoie aujourd’hui un signal clair: la littérature n’était pas qu’un à-côté, un répit entre deux tableaux grand format. Hollywood est un livre bien différent du précédent, mais il en prolonge certaines thématiques, celle par exemple de la quête de sens à une époque où le sacré bat de l’aile. Au centre, il y a une histoire d’amour. Amour fou, auquel le narrateur ne croyait pas vraiment jusqu’à ce que Branka, installée de ce côté-ci de l’Atlantique après avoir vu de près les horreurs de la guerre, dans la Sarajevo de 1992, fasse son entrée dans sa vie. Énigmatique, toujours à chercher le vrai sous le vernis des choses, survivante d’épreuves qui auraient pu fissurer sa raison mais qui l’ont plutôt éveillée, Branka laisse entrevoir au narrateur un avenir fait d’étonnements et de complicité. Puis le trou noir. Un 24 décembre, dans les rues de Jersey City, Branka reçoit une balle perdue dans la nuque. Elle s’effondre devant lui, elle qui quelques jours plus tard devait accoucher de leur enfant. Éperdu, lui boit jusqu’à plus soif et sera recueilli par Sarah et Henry, un couple vivant au fond d’une ruelle de Brooklyn, en marge de la société. À ce drame-là s’en ajoute un autre, un geste politique ultramédiatisé qui survient le même jour: en orbite autour de la Terre, un astronaute tchétchène a volontairement défait le lien qui le rattachait à sa fusée, lors d’une sortie dans l’espace. Il va mourir au bout de son oxygène, dérivant à 28 000 km/h. Il se trouve que ce dernier, venu vivre au Québec avec ses parents quand il était jeune, a été le grand ami d’enfance du narrateur. Il se trouve par ailleurs qu’il a connu Branka, dans des circonstances troubles. «Il se trouve que» reviendrait souvent si on poursuivait le résumé, tant les coïncidences paraissent grosses ici, hormis peut-être pour les consommateurs de blockbusters américains. Mais le livre a pour titre Hollywood, après tout, et si Marc Séguin s’approche autant des clichés, c’est probablement pour nous faire voir des vérités si criantes que ces derniers ne les masquent pas tout à fait. De fait, on retiendra surtout l’acuité du regard posé sur notre époque, son système médiatique envahissant, sa difficulté de trouver une solution de rechange à la foi, et l’attention portée, malgré tout, à l’irrésistible musique du vivant. Éd. Leméac, 2012, 184 p.

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