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Cannes 2009: Du sport et des hommes

 

Jusqu'à l'arrivée de Brad Pitt sur la Croisette – z'avez vu Quentin Tarantino dansant avec Mélanie Laurent sur le tapis rouge d'Inglorious Basterds? J'aurais voulu me joindre à eux! -, la star incontestable de cette 62e édition était Eric Cantona, ex-joueur de foot ayant surnommé "The King" par les supporters du Manchester United (où il a eu pour coéquipier Beckham).

Dans Looking for Eric, un postier dépressif (Steve Evets) dont les beaux-fils se retrouvent aux prises avec des criminels à la petite semaine, trouve réconfort auprès de l'affiche de Cantona qui se matérialise.

Ayant quitté une brillante carrière à 31 ans, Cantona se consacre au cinéma depuis 12 ans; on l'a notamment vu dans Le Bonheur est dans le pré et Les Enfants du marais. De là à dire que le sympathique acteur brille par son jeu à l'écran dans son propre rôle serait exagéré, mais il arrive à tenir tête à l'excellent Steve Evets grâce à son charisme, sa générosité et son sens de l'autodérision dans Looking For Eric, comédie dramatique sensible où Ken Loach et son scénariste Paul Laverty ne délaissent pas leurs préoccupations sociales. Une chose est sûre, Cantona est meilleur acteur que trompettiste – il s'est familiarisé avec la trompette après avoir été suspendu 9 mois pour avoir sauté sur un spectateur.

"C'est très particulier de se jouer, a dit Cantona avec son charmant accent marseillais. C'est une fiction avec des répliques merveilleusement écrites. J'ai vécu de la pression, j'ai posé des questions inhabituelles à Ken grâce à qui je suis arrivé sur le plateau en toute confiance. J'ai aussi eu une séance de travail avec Paul, que j'ai trouvé courageux de me présenter ce scénario. Je joue beaucoup de ça, rire de moi-même, c'est une arme. Le foot est un jeu, le cinéma, un grand jeu." "Cantona joue comme au foot: avec son instinct et sa créativité", a lancé le réalisateur.

A propos du passage vers la comédie, Ken Loach explique: "Nous avons fait des films très durs et nous nous sommes dit que ça serait bien de faire un film plus facile. Au fond, une comédie est une tragédie qui finit bien. Looking for Eric aurait pu être une tragédie; peu importe le registre, l'important, c'est de demeurer vrai."

A savoir quelle était la différence entre le réalisateur anglais et son ex-coach de Manchester, Alex Fergusson, Cantona y est allé de cette réponse: "Ils sont très similaires. Il faut savoir tirer 100% de l'action, durer de match en match, de film en film. Tous deux sont d'une humilité incroyable, ce sont deux grands hommes et c'est l'essentiel."

A propos de l'importance du foot chez les Britanniques, Loach refuse de se lancer dans une explication anthropologique, mais avance ceci: "Le football permet de se réunir, d'être fier de son pays. Les gens peuvent exprimer leurs émotions, lesquelles vont du désespoir à l'espoir, en passant par la joie."

Paul Laverty poursuit: "Le foot fait partie de nos vies. En Ecosse, où j'ai grandi, nous changions nos week-ends en fonction du foot. Tout le monde jouait au foot. Je crois que nous avons tous besoin de magie, de spontanéité et jouer au foot avec ses amis, c'est quelque chose de fantastique."
Enfin, Loach aurait-il voulu se mesurer à Cantona sur le terrain? La réponse est spontanée: "J'ai fait bien des choses stupides dans ma vie, mais jamais je n'aurais osé jouer au foot avec Cantona."