BloguesObjecteur de conscience

Du fusil à la plume…

Certains connaissent d’emblée leur vocation professionnelle. D’autres, comme moi, doivent se résigner à l’approche « essai-erreur », avec, comme les produits de fitness vendus dans ces infopubs pour insomniaques virtuoses de la carte de crédit, des résultats qui peuvent varier.

C’est ainsi que, après avoir porté bérêt, bottes et fusil d’assaut durant près de 12 ans, j’entame maintenant ma troisième année en tant que journaliste indépendant – et de jeune retraité de l’armée.

Transition étrange, penserez-vous. Pas tant que ça. Dans son incarnation la plus idéaliste, le soldat veut sauver le monde. Le rôle qu’il se donne – du moins celui qu’on devrait lui donner -, de nos jours, au-delà de la défense du pays, est de protéger les faibles. Sa force physique et mentale constitue un rempart entre les populations opprimées et ses ennemis. Son arme est le dernier recours après l’échec de la diplomatie.

Le journaliste aussi. Dans son incarnation la plus idéaliste, le journaliste veut sauver le monde. Le rôle qu’il se donne – du moins celui qu’on devrait lui donner -, de nos jours, au-delà de tout ce qu’on peut penser de l’état actuel des médias, est de monter aux barricades du pouvoir au nom du citoyen. « Comfort the afflicted, afflict the comfortable », pour reprendre une expression de Finley Peter Dunne, journaliste muckraker – les ancêtres des journalistes d’enquête d’aujourd’hui – du tournant du 20e siècle. Sa curiosité et sa résilience dans sa perpétuelle quête d’information sont le fer de lance de la démocratie. Sa plume aiguisée peut infliger plus de mal aux empêcheurs de justice et aux malfrats qui foirent sans honte sur le dos du peuple.

Vous pardonnerez ce simplisme et ma naïveté – je suis encore enthousiaste dans l’exercice de mon métier. C’est ainsi que nous brisons la glace ici, vous et moi, sur cet espace blogue qui se voudra plutôt libre, mais qui accordera ces temps-ci un peu plus d’importance à un projet un peu fou.

Car c’est ce même enthousiasme pour le journalisme, indépendant de surcroît, qui m’a inspiré l’idée de partir pour le Mali, ce pays dont on entendait peu parler jusqu’à la semaine dernière. Un ancien « pays-modèle » d’Afrique de l’ouest en termes de stabilité politique – relative à la réalité politique du continent, qui collectionne coups d’état et invasions – et désormais en proie à une guerre qui ne manquera pas de faire, comme elle sait bien s’y prendre, ravages, réfugiés tout en semant mort et destruction.

Je couvrirai donc le conflit en tant que journaliste indépendant. Soyez à l’affût!

C’est parce que je déteste la guerre que je veux qu’elle cesse. Et si j’ai longtemps cru que le rugissement des canons pouvait enterrer ses cris les plus stridents, mon idée fut profondément transformée au lendemain de mon service en Afghanistan il y a quelques années. Et à force d’essais et d’erreurs, j’ai fini par troquer le fusil pour la plume. Combattre avec d’autres armes. Rendre compte de grandes calamités dans l’espoir d’intéresser les vrais décideurs – nous tous.

Encore une fois, pardonnez ma naïveté d’avance lorsque vous lirez ici sur mes états d’âme et peut-être le récit de quelques péripéties. Voyez ça comme notre première rencontre – la timidité laissera place à plus de complexité.

Je vous souhaite une bonne lecture et vous invite aussi à commenter et à discuter.