Musique

Prise de son : La crème de la crème

Nul doute que le concert le plus attendu de la semaine dernière était celui de Moby, dans le cadre de l’événement Cream, au Stade olympique. Et il ne m’a pas déçu, loin de là. Enfin, un acteur de la scène électronique qui n’a pas peur des lumières! Enfin, un acteur de la scène électronique qui donne de vrais spectacles et qui ne se cache pas continuellement derrière ses machines!

Mais, au-delà du personnage de techno-star qu’il est en train de se créer, Moby est surtout un compositeur inventif, qui n’a aucune crainte (il fallait le voir debout sur une caisse de tournée, les bras en croix, à la fin du concert!), et qui possède une grande culture musicale. Si l’époque est au mélange des genres, Moby n’y échappe pas. Seule différence (mais primordiale): chacune de ses influences est passée à la moulinette Moby, et il faut parfois vraiment écouter attentivement pour saisir les différents rythmes ou mélodies utilisés.

Si certains morceaux – dans leurs versions live -, avaient la lourdeur du heavy-métal, à d’autres moments, on a cru déceler une rythmique ska, par exemple. Parfois, c’est le blues – si présent sur son dernier album, Play – qui renait une place prépondérante, malgré l’omniprésence de cette rythmique dansante. Le mélange des genres oui, mais pas une seule seconde nous ne pouvions douter que ce que nous entendions était bel et bien du Moby. Et, pour une fois dans ce genre d’événement, la sonorisation de la salle étant impeccable d’un bout à l’autre.

Il faut dire aussi que Moby savait très bien qu’il jouait devant une foule qui demandait davantage à danser qu’à écouter. Ce qui a, bien évidemment, orienté le choix des pièces interprétées, mais aussi des versions jouées. Mais Moby n’est pas complètement vendu à son public non plus. Il lui a réservé quelques défis assez savoureux, loin de la tendance house-techno qui fait fureur à Montréal depuis des années, comme ce dernier morceau, reconnu comme étant le plus rapide au monde, impossible à suivre, même si plusieurs autour de moi s’y sont essayés!

Seul léger regret: Moby n’a joué qu’une toute petite heure.

***

Tout de suite après le géant américain, toujours au Stade, les Français de Daft Punk nous ont présenté, pour la deuxième fois de leur carrière à Montréal, un set de D.J. Je ne sais pas si celui de samedi dernier était meilleur que le premier; chose certaine, il était tout au moins aussi inégal.

Ce qu’on aime chez Daft Punk, c’est son côté minimaliste sec, sans fioritures: un rythme martelé, fort, incontestablement dansant, et, par-dessus, une ligne mélodique ininterrompue, qui laisse beaucoup d’espace à l’imagination. Des chansons comme Da Funk ou Rollin’ and Scratchin’, entre autres. Lorsqu’il donne dans ce genre, nous n’avons plus aucun reproche à faire au duo français.

C’est lorsqu’il tente de remixer en direct que j’ai de la difficulté avec Daft Punk. C’est dans ces moments que j’ai l’impression que le duo s’éparpille, tente d’en faire trop, émiette les rythmes, les disloque; malheureusement, je perds beaucoup d’intérêt. Un set de D.J. inégal donc, mais qui n’enlève rien au fait que l’on commence à avoir vraiment très hâte d’entendre le second compact du groupe…

***

Juste avant de me pointer au Stade, je suis allé voir Mass Hysteria, groupe français qui donne dans la fusion, au Spectrum. Malgré un positivisme à toute épreuve, ce groupe-là est une véritable machine de guerre! Impossible de ne pas succomber à ce rouleau-compresseur rythmique, à ce véritable mur de son qu’érigent les six musiciens sur scène. Pour ce faire, Mass Hysteria applique une vieille recette qui fonctionne toujours: il est hyper-tight.

Alors que l’on commence à peine à connaître les chansons qui composent Contraddiction, le deuxième compact du groupe, on retrouvait avec autant de plaisir les succès du premier enregistrement comme Donnez-vous la peine (même si on eût aimé que le rythme électronique soit beaucoup plus présent et plus pesant). Comme on a beaucoup apprécié l’entrée remarquée de la tendance reggae dans la musique de Mass Hysteria.

En écoutant le sextette, je me disais que la fusion à la française n’avait peut-être pas encore atteint son point de saturation, même si ce groupe est le dernier survivant de cette grande famille. En effet, à la suite au démantèlement de Lofofora, des problèmes internes majeurs de Oneyed Jack et du sabordage de No One Is Innocent, Mass Hysteria (que personne ne donnait gagnant il y a un an ou deux) tient encore haut et fort le flambeau et reste parmi les meilleurs du genre.

La grande question maintenant est: combien de temps Mass Hysteria continuera-t-il dans cette direction? Peut-il encore avancer dans ce sens? Doit-il surprendre ses fans lors du lancement de son troisième album? La fusion est-elle obligatoirement un cul-de-sac?