Musique

Fredric Gary Comeau : Livre ouvert

Récemment, après avoir publié cinq recueils de poésie en français, Fredric Gary Comeau lançait son premier album, en anglais. Un disque qui se démarque par l’austérité et la noirceur de son timbre vocal.

Fredric Gary Comeau a vingt-neuf ans, et il est originaire du Nouveau-Brunswick. Récemment, après avoir publié cinq recueils de poésie en français, il lançait son premier album, en anglais. Un disque qui se démarque par l’austérité et la noirceur de son timbre vocal, qui s’apparente à celui de Leonard Cohen. Comme lui, Comeau est un auteur-compositeur qui possède son propre univers. «On pourrait dire que mes écrits ont un contenu spécifiquement acadien, mais je parle beaucoup de voyage, comme mon disque d’ailleurs.»

Comment, finalement, décide-t-on de passer à la scène? «Je n’ai pas abouti à la chanson du jour au lendemain; ça fait dix ans que j’écris des chansons et que je fais des démos. Au moment où mon copain Martin Ravary m’a convaincu de faire un disque, j’étais en train d’écrire un roman. Mais être musicien, ça ne m’est pas venu naturellement; je n’ai pas ce don inné. Pour y arriver, j’ai dû travailler crissement fort. Pour l’instant, je m’investis dans la musique, mais je demeure quand même écrivain. De toute façon, même lorsque je fais des lectures de poésie, je donne un show.»

Ce goût de l’errance, omniprésente dans ses textes, il le doit à son père: «Ironiquement, confie-t-il, mon père est quelqu’un de très stable, qui a peu voyagé parce qu’il avait une famille. Quand j’étais petit, il m’emmenait faire des balades en voiture et on écoutait Hank Snow, qui est, en quelque sorte, un Hank Williams canadien. C’est avec ses chansons que mon père s’évadait, et cela a beaucoup marqué mon imaginaire. Pour ma part, j’écris sur mon vécu. Toutes mes chansons ont une signification très personnelle. Moi, je me sens heureux lorsque je voyage.»

Sur la photo de la pochette d’Another Broken Lullaby, son seul et unique compact, un immense flacon de pilules remplit l’espace. Et en lisant attentivement la posologie qui l’accompagne, on est frappé par l’autodérision de la phrase «Take one cdvalium, listen and sleep». Ne faut-il pas un certain courage pour qualifier sa propre musique de soporifique? «Non, ça ne me dérange pas de dire que c’est endormant; on a besoin de dormir parfois, on a besoin de relaxer. Un exemple: tu vas dans un Second Cup, pis c’est devenu une discothèque. J’aime le techno, mais pas dans un café! C’est juste à cause de ça: on est stimulé partout, mais à un moment donné… Cependant, je reconnais que ma musique apaise, bien qu’en spectacle, je m’énerve un peu plus.»

On ne s’étonnera donc pas que notre homme ait enregistré Another Broken Lullaby dans le calme d’une église: «Je me suis inspiré de Richard Desjardins, qui avait capté un de ses albums à la Chapelle historique du Bon-Pasteur; j’aimais beaucoup le son qui en émanait, même si ce n’est jamais parfait, mais il y a un état, il y a quelque chose qui passe. Je l’ai fait en solo tout simplement parce que je n’ai pas de musiciens, et que, pour l’instant, je préfère m’accompagner à la guitare. Je n’étais pas à la recherche de la perfection mais plutôt de l’authenticité.» Fredric Gary Comeau a déjà dans sa mire le prochain album, «qui aura plein de musiciens et plein d’arrangements. Il est même question qu’Yves Desrosiers (Lhasa, Leloup) y collabore. On le lui souhaite. En attendant, Comeau monte seul sur scène en ramenant ses chansons voyageuses à leur plus simple expression: adoucies, épurées et presque murmurées à l’oreille. L’essentiel, quoi.

Le 11 décembre
À la Balustrade du Monument National
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