Catherine Major : La vie en partage
Musique

Catherine Major : La vie en partage

Catherine Major revient d’Europe avec une boule de création sur le point d’exploser. Dans un tournant de sa carrière, la jeune artiste fait le point.

Elle a fait paraître son premier album Par-dessus bord en février 2004 et récolte depuis éloges et prix de toutes sortes pour sa pop métissée originale et son audace sur scène. Elle attirait déjà des oreilles curieuses en 2001 en remportant le Prix Chanson primée de la Socan au Festival en chanson de Petite-Vallée pour ensuite être sacrée meilleure auteure-compositrice-interprète l’année suivante à ce même festival. En 2004, elle était le Coup de coeur de l’Académie Charles-Cros et recevait plus tard, grâce à une vitrine à la Bourse Rideau, le Prix des diffuseurs européens, qui l’a entraînée dans une tournée d’un mois en France, en Suisse et en Belgique, en mars dernier.

LE NOYAU CRÉATIF

Attablée dehors au soleil, sur une terrasse improvisée en cette belle journée de printemps, c’est une femme épanouie, le cheveu fou blond, qui attend sereinement qu’on dissèque son mystère. "J’ai l’impression d’être dans un noyau de changements dans ma vie, un virage super important, et je ne sais pas trop comment l’exprimer encore", soupire la chanteuse de retour d’Europe, qui dit y avoir appris le vrai rythme de tournée, sur la route, où le stress s’estompe pour laisser place à une plus grande part de plaisir. "C’est sûr que la tournée, ça bloque la création, même si ça m’inspire. C’est souvent une question de temps et d’instruments. J’ai pris quelques notes et je me suis dit: "Quand je vais revenir, ça va débouler." Et je suis bloquée depuis que je suis revenue, mais totalement! Je sens que ça s’en vient. Ce matin, je me suis dit: "C’est fini, là, c’est la dernière semaine de blocage que j’ai!" J’ai encore la boule en dedans, quand elle va ouvrir, là, ça va aller", confie la chanteuse de 26 ans au physique bohème, tout de vert vêtue.

Ainsi, la jeune chanteuse a commencé depuis peu à plancher sur son second album, le premier s’étant quelque peu épuisé au fil des spectacles où les chansons ont connu nombre de variations: "Je suis rendue ailleurs et si j’avais à refaire l’album, je le ferais différemment. Quand on est rendu à s’imaginer refaire les choses différemment, c’est qu’il faut passer à autre chose", lance celle qui s’avoue de nature "pressée", mais qui a appris les vertus de la patience.

Pianiste depuis l’âge de quatre ans, Catherine Major avait choisi pour son premier album de mettre à l’avant-plan, dans sa méthode classique, le piano et la voix. Pour le prochain opus, celle qui mêlait jusqu’à maintenant les musiques latines, africaines, la chanson française, le tango et la salsa s’intéresserait-elle aux "bidouillages électros"? "Pour certaines chansons, peut-être. J’aime ça et j’en écoute; il y a des choses qui me rejoignent, d’autres pas. J’aime beaucoup l’acoustique et je ne changerai jamais ça, c’est sûr. Et puis le piano, par définition, est difficilement "bidouillable", il peut l’être, mais ça reste un instrument que j’aime tel quel. Je m’y connais moins en électro, je fais surtout de l’écriture d’arrangements… Je suis donc un peu à la recherche d’une personne qui pourrait m’apporter ce côté-là, sans pour autant dénaturer le côté acoustique", raconte la passionnée des musiques du monde. "Puisque je ne peux pas voyager à mon goût, c’est-à-dire tout le temps, je voyage en achetant des disques qui viennent d’ailleurs, j’y vais souvent au hasard… Je vais chez les disquaires, je choisis par exemple la section Russie puis j’achète des trucs que je ne connais pas, mais qui vont m’apporter quelque chose sur le plan musical. Je trouve que la musique parle, même sans mots."

LE PARTAGE

En plus de diverses collaborations, celle qui produisait son premier album en solo envisage maintenant de faire appel à un réalisateur qui saura nourrir sa passion. "Je n’ai plus cette vision de vouloir tout faire moi-même. J’ai besoin d’avoir le dernier mot, c’est certain, mais j’ai besoin de collaborer avec des gens qui vont m’apporter quelque chose. J’ai vraiment besoin de partager. Je suis une fille qui aime prendre le contrôle, puis en même temps, j’apprends tranquillement à déléguer. J’ai rencontré dernièrement la bonne équipe pour la gérance, je m’aperçois tranquillement que je peux faire confiance. Ce sont de gros morceaux qui me manquaient. Je suis pas obligée de faire tout, et d’ailleurs, quand on fait tout, on ne fait rien vraiment bien non plus."

Dotée d’une plume souple, Catherine écrit sur le genre humain et traite des relations d’amitié, d’amour, mais aussi de problèmes sociaux qui la piquent au vif. "Je n’ai pas de pudeur à exprimer ce que je ressens en général. Je suis une fille qui parle beaucoup dans la vie, je ne suis pas quelqu’un qui retient ses émotions. J’ai vécu des changements assez importants dans la dernière année et j’ai des chansons plus dures qui l’expriment. Je n’ai pas de mal à en parler, parce que ça a beau être de l’art, les chansons expriment un peu ce qu’on vit, quitte à me faire demander c’est quoi cette histoire. Je n’ai pas de pudeur avec ça." Mais qu’est-ce que cette histoire justement? "Rien de particulier, c’est une rupture comme une autre, explique-t-elle, après un effet de surprise cocasse. C’est pas tant la rupture que le sentiment de m’être trompée. Par contre, il y a des super belles choses qui arrivent après, et ça, c’est formidable, et ça donne un autre souffle de création. J’ai réglé une période en écrivant quelques chansons. Maintenant, je suis dans une période complètement joyeuse parce qu’il y a quelque chose qui m’est arrivé de super beau." L’amour? "L’amour", acquiesce-t-elle les yeux pétillants.

Ainsi, c’est dans la continuité de sa tournée qu’elle s’arrêtera à Gatineau avec son trio de musiciens – Christophe Papadimitriou (contrebasse), Nicolas Major (guitare) et Francis Roberge (percussions et batterie) -, à la Salle Jean-Despréz. "Est-ce qu’il y a un piano dans cette salle?" s’enquiert-elle, inquiète.

Un été des plus chargés attend la chanteuse: après des spectacles au Festival de Montauban et à Pully en Suisse, elle participera pour une deuxième année à la tournée organisée par l’Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ), qui emmène quatre artistes québécois outre-mer pour des spectacles dans différents festivals. Catherine Major sera donc entourée de Yann Perreau, Catherine Durand et Thomas Hellman pour des spectacles aux Déferlantes francophones de Capbreton à la fin juillet, puis à Saint-Malo et à Limousin-Beaumont, en août.

Le 20 avril à 20h
À la Salle Jean-Despréz
de la Maison du citoyen