K-Os : 10 000 heures plus tard
Musique

K-Os : 10 000 heures plus tard

K-Os, le rappeur philosophe, cède la place à K-Os-le-fêtard sur son nouvel album Yes!.

Dans Les Prodiges, le journaliste Malcolm Gladwell décrit la loi des 10 000 heures. En bref, il explique qu’il faut dix ans, dix mille heures, pour devenir vraiment bon dans un domaine. Kevin Brereton, alias K-Os, aurait pu servir de cas d’école à Gladwell. "Mon guitariste me parlait de cette théorie, commente le rappeur lorsqu’on lui parle de l’hypothèse. Je ne savais pas qui en était l’auteur mais c’est certain que ça pourrait s’appliquer à mon travail. Cela fait dix ans que j’ai commencé ma carrière et je dois dire que ce n’est que maintenant que je me sens à l’aise."

En quatre albums et dix années à raffiner son cocktail euphorisant de hip-hop, de pop et de rock, K-Os n’a jamais été aussi près de réaliser son plein potentiel. Yes! est pour lui l’album de la maturité. Étonnamment, c’est aussi son disque le plus fêtard, le moins prêchi-prêcha.

"Je pense que j’ai finalement réussi à passer le cap de mon enfance, de mes insécurités. Aujourd’hui, je rappe moins pour moi que pour rendre un service public: faire tout ce que je peux pour amener un peu de joie dans la vie des gens qui écoutent mes disques ou viennent me voir en spectacle. C’était aussi le but de Joyful Rebellion mais je pense l’avoir vraiment atteint avec Yes!."

Pour créer l’album, K-Os s’est donné les coudées franches. Il a quitté sa compagnie de disques historique EMI pour lancer Crown Loyalist, son propre label, en association avec Universal. Il s’est donné un pied-à-terre à Vancouver, histoire de troquer le smog torontois contre l’air frais et plus inspirant des Rocheuses. Surtout, il s’est imbibé de culture pop.

On retrouve d’ailleurs sur l’album toutes sortes de références à la belle époque de la pop: échantillonnages de Frida ou de Prince. "J’ai vraiment beaucoup de respect pour la musique des années 80. Quand j’écoute les grands succès de l’époque, comme, par exemple, ce que faisait Madonna, je reste admiratif devant la candeur et la simplicité de cette musique."

Par opposition, le M.C. se méfie de la coolitude des jeunes groupes indé. "Il y a une froideur, quelque chose d’un peu taciturne chez certains membres de la scène indie lorsqu’on les voit sur scène. Je pense que la nécessité d’être cool que ressentent ces artistes agit comme un carcan. Je vois beaucoup de musiciens qui, selon moi, ne se laissent pas assez aller. Moi, j’ai arrêté de jouer ce jeu-là. Ça ne m’intéresse plus de poser."

Si l’on fait grand cas du fait que le père de K-Os était un pasteur, on parle moins de l’influence de ses racines trinidadiennes où il puise une certaine idée de la fête. "Trinidad, c’est le carnaval, le calypso. Il y a dans la musique de là-bas une vraie joie. Le calypso, c’est une façon de porter un regard positif sur la vie. Même si les traces de cette musique sont discrètes dans ce que je fais, il n’est pas faux de dire qu’en vérité, mes albums sont des albums calypso. Je pense d’ailleurs que je me dirige vers cette énergie, surtout en show. Après tout, on est le produit de nos racines."

À écouter si vous aimez / K’Naan, Mos Def, Shad