Richard Desjardins Symphonique : La puissance d'un boeing
Musique

Richard Desjardins Symphonique : La puissance d’un boeing

Les Disques de la Société Radio-Canada lanceront mardi Richard Desjardins Symphonique, un album enregistré lors de deux concerts spéciaux présentés par Coup de coeur francophone. Discussion avec l’artiste.

Ils étaient 47 musiciens sur scène au Centre Pierre-Charbonneau les 13 et 14 octobre 2004. Devant cet imposant contingent d’instruments (violons, contrebasses, clarinettes, hautbois, bassons, trompettes, harpe), deux hommes: le chef d’orchestre Gilles Bellemarre et le grand Richard Desjardins, à qui l’on avait demandé de chanter ses compositions sans apporter d’instrument. Pas de guitare, pas de piano.

"Gilles voulait avoir le champ libre pour réinterpréter ce que j’avais composé. C’était assez stressant parce que la guitare et le piano, c’est ce qui me sépare et me protège du public en concert. Ils sont toujours devant moi en cas de problème. La situation était paradoxale: je n’avais jamais été aussi seul sur scène, alors que j’étais accompagné par le plus grand nombre de musiciens de ma carrière", explique Richard Desjardins, qui avoue avoir trouvé ses aises rapidement. Il n’a qu’à fermer les yeux pour revivre l’émotion sentie lors de ces spectacles symphoniques aussi présentés à Québec, Trois-Rivières et en Europe. "Heille, chanter avec ça dans le dos! Tu sais, un orchestre symphonique, ce n’est pas fort en décibels, pas mal moins que quand je joue avec Abbittibbi. C’est plutôt le spectre sonore qui est rempli d’un bout à l’autre. Ça donne un effet ahurissant. Comme si t’étais assis sur la coque d’un boeing en plein décollage."

Sous la baguette de Gilles Bellemarre, l’oeuvre de Desjardins gagne en puissance, en richesse, en émotion. Si les versions originales d’Akinisi, Miami ou Les Yankees ont déjà des allures d’épopées, ces pièces deviennent ici des récits épiques déclinés en plusieurs mouvements, tous plus poignants et romanesques les uns que les autres. Même la plus anecdotique Le Bon Gars laisse place à des envolées de violons vertigineuses. Imaginez maintenant L’Homme-canon, Le coeur est un oiseau et Tu m’aimes-tu? "Je ne réécoute jamais mes albums, mais celui-là me plaît beaucoup. Ça sonne en titi. J’étais ben fier de le faire écouter à mes chums", lance en riant le chanteur récemment aperçu aux Francs-tireurs où il a fait une sortie vigoureuse contre les exploitants de la mine d’or à ciel ouvert de Malartic, la compagnie Osisko.

Avec son ami et réalisateur Robert Monderie, Richard Desjardins prépare un nouveau documentaire sur l’exploitation minière de l’Ontario et du nord de l’Abitibi-Témiscamingue au cours des 100 dernières années. "Les compagnies sont venues, ont pillé nos ressources naturelles, ont redonné des miettes à la population locale et sont souvent reparties en laissant un désastre écologique. C’est ce qui arrive à Malartic présentement. La population du Québec doit savoir ce qui se passe."

Véritable chien de garde des ressources naturelles abitibiennes, le musicien reprend donc le flambeau à une époque où plusieurs croient que le simple rôle de l’artiste est de divertir. À travers tous ses combats, Richard Desjardins confirme qu’il n’a jamais reçu de menace d’entreprises assoiffées de profits. "Pas encore. Les rares critiques me viennent des populations concernées, comme celle de Malartic, qui voit la mine comme une solution au chômage récurrent. Les habitants de la ville ont vu passer trois mines et deux moulins à scie. C’est quoi, ce développement-là? Pourquoi sont-ils toujours aussi pauvres? Dans ce contexte, les gens ne veulent pas trop qu’on parle en mal de la mine. Quand tu lances un steak au milieu d’une meute de chiens affamés, c’est certain qu’ils ne vont pas chialer… On est revenu au principe d’une company town." Entrevue à voir à lesfrancstireurs.telequebec.tv/.

Richard Desjardins
Richard Desjardins Symphonique
(Les Disques SRC)

En magasin le 24 novembre

À écouter si vous aimez /
Richard Desjardins, Ludwig van Beethoven, Gustav Mahler