The Peptides : Te haïr, je veux bien
Musique

The Peptides : Te haïr, je veux bien

Le duo The Peptides brandit fièrement son drapeau arc-en-ciel face à l’adversité et à la laideur humaine. Rencontre ensoleillée autour de quelques bières-déjeuners.

Curieux de voir à quel point on peut parfois se méprendre. En tout début d’entrevue, je laisse entendre que The Peptides, projet dont les troisième et quatrième albums – respectivement For Those Who Hate Human Interaction et North Hero – viennent simultanément de voir le jour, se révèle d’une dualité indubitable, lui (Claude Marquis, cerveau créateur et ermite de studio) représentant le feu et elle (DeeDee Butters, interprète et muse) tempérant les élans fougueux et viscéraux par sa force tranquille à l’image même de l’eau. "Vraiment? Attends de rencontrer DeeDee. Tu verras", m’assure Claude Marquis, un sourire en coin, derrière ses verres fumés, en s’asseyant à une table de la terrasse ensoleillée du Centretown Pub, sympatique pub gay du centre-ville ottavien. Ce cumul me semble pourtant magnifiquement mis en musique, principalement sur For Those Who Hate Human Interaction, un voyage auditif schizophrénique où iconoclasme rime avec commentaire social, qui se révèle hors de tout doute le seul album concept 100 % made in Ottawa jamais créé. Quelques minutes plus tard, DeeDee Butters fait son entrée et me fournit la preuve que Marquis disait bel et bien vrai. Je me suis trompé sur toute la ligne.

CES RENCONTRES DÉTERMINANTES

The Peptides existait depuis déjà quelques années quand Claude a fait la rencontre de DeeDee, une femme coup de vent d’une beauté féline, au vocabulaire varié, à la voix puissante et au rire communicatif. "On m’avait raconté que Claude faisait un genre de musique expérimentale, mais pas du genre "paowm paowm" où on ne comprend rien de ce que l’auteur veut dire", raconte la chanteuse, jouant de percussions imaginaires. "Non, je comprenais que Claude utilisait le vocabulaire pop pour arriver à autre chose", affirme DeeDee, en ajoutant avoir rencontré Claude au tout début du projet For Those Who Hate… "Ce qui m’a surpris le plus, c’est à quel point Dee s’est livrée au jeu – parce que c’était souvent le cas, elle avait à camper des rôles – avec abandon. Dès la première soirée, elle m’a complètement jeté à terre en interprétant, sur le spot et à plein registre, Mother de John Lennon. Pas comme John la chantait, mais comme Christina [Aguilera] le fait. C’est-à-dire FORT", raconte l’auteur-compositeur au moment où DeeDee entame quelques notes du classique de Lennon. C’est ainsi que le créateur s’est lié d’amitié avec l’interprète et a, ce faisant, donné à The Peptides un second souffle. "Conjointement, c’est le début du projet For Those…, qui est si grandiose, si ambitieux, et l’arrivée de DeeDee qui ont permis à The Peptides de réitérer plusieurs positions artistiques."

CETTE PERPÉTUELLE HAINE

For Those Who Hate Human Interaction – dont les 25 pièces débutent toutes par For Those Who Hate, exception faite de la francophone Pour ceux qui haïssent – est une lettre ouverte à propos de la haine qu’entretient notre société qui vit à l’heure des réseaux sociaux. "Prends, par exemple, n’importe quelle vidéo sur YouTube. Dans 90 % des cas, les commentaires publiés en bas de l’écran ne se révèlent être que des insultes et des messages haineux. Cette laideur humaine, cet anonymat cruel me fascinent autant qu’ils m’effraient." DeeDee Butters renchérit: "C’est ce manque de responsabilité sociale qui fait peur. Nous croyons communiquer, mais ça s’avère être une forme de discours unidirectionnel non responsable, parce qu’autrement, en société, traiter quelqu’un de sale pute en plein visage prend des couilles, de un, mais aussi laisse place à une réaction instantanée du récepteur du message ainsi que des individus touchés par cette affirmation, ce qui n’arrive jamais sur le Net."

For Those Who Hate Human Interaction
(Indépendant)
En vente dès maintenant au
www.thepeptides.bandcamp.com

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