BélO : La vie est BélO
Musique

BélO : La vie est BélO

Petit BélO deviendra grand. Si, en Haïti, un chanteur peut devenir président, un artiste engagé reste un ambassadeur qui doit connaître sa mission.

"Je ne veux pas qu’on me case, qu’on me limite. Je ne suis pas un artiste engagé, pas un artiste reggae. Je veux être un artiste libre, c’est tout. Libre de changer d’orientation ou d’esthétique demain, si nécessaire ou si ça me chante."

Depuis les belles années de Boukman Eksperyans, le super-groupe vaudou-rock défendu par Chris Blackwell et l’étiquette Island, aucun autre nom en provenance de la première république noire n’avait connu un tel rayonnement international, un artiste solo et indépendant de surcroît!

Jean Belony Murat est né à la Croix-des-Bouquets, cette bourgade de la plaine du Cul-de-Sac, berceau d’un autre chanteur connu mondialement: Wyclef Jean. Gagnant du concours Découvertes de Radio France Internationale, BélO ce samba (on dit cela, dans son pays, d’un barde ou d’un auteur inspiré) captive sur scène par son énergie et sa sincérité. Agrippé à sa guitare, chantant à pleins poumons, le chanteur incandescent est d’autant plus percutant que son allure, au premier coup d’oeil, paraît sage et frêle.

"Nous perdons les valeurs essentielles qui font de nous des Haïtiens, affirme le chanteur. Une musique peut être à la fois universelle, comme le jazz et le blues, mais typée, identitaire, car l’auditeur y reconnaît des signes particuliers. La musique "rasin", par exemple, est un mélange de rock et de rythmes vaudou. Mais personne ne doute de sa provenance. Elle vient d’Haïti."

Autre particularité chez ce garçon passionné: son écriture incisive. Élevé, de son propre aveu, dans un milieu très restrictif par des parents très craintifs qui lui imposaient toutes sortes de contraintes, il trouvera en la musique sa seule échappatoire. Lorsqu’il affirme, à 11 ans, qu’il va devenir chanteur professionnel, personne ne voit en lui le chroniqueur social acerbe qui va s’imposer comme symbole positif d’une génération.

"Je me considère comme un soldat de la diversité culturelle et linguistique. Ainsi, nous avons deux langues, le créole et le français. Mais le créole est notre force, ce qui nous rend différents."

C’est le fameux tandem de producteurs Fabrice Rouzier et Kéké Bélizaire qui flaire le potentiel inédit de BélO. Ensemble, ils enregistrent Lakou Trankil, un album créole à saveur reggae qui fera date. Suivra l’impressionnant Référence, réalisé à Miami par Andy Barrow, dont l’impact n’explique qu’en partie les succès de BélO aux États-Unis et en France. Mais aussi au Brésil, en Asie, en Europe de l’Est.

"Je ne joue pas de konpa, rappelle fermement BélO, faisant référence à la musique de danse pratiquée par la majorité des groupes d’Haïti. Je suis pour l’ouverture sur le monde, tout en conservant ce qui fait de nous qui nous sommes."

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FINA 2012

Il y a beaucoup à voir dans l’édition 2012 du Festival international Nuits d’Afrique: les retours en salle très attendus de la Tunisienne Emel Mathlouthi et de la formation Gnawa Diffusion avec son leader algérien Amazigh Kateb; le concert extérieur et gratuit de Tiken Jah Fakoly et la performance du trio malien SMOD, mené par le fils d’Amadou et Mariam. Ajoutez à cela le reggae de Dub Inc. venu de France. Soirée cruciale, ce soir, avec Les Tambours de Brazza qui cognent à La Tulipe et le petit prince, Rômmel Ribeiro, un talent brut avec un groupe bouillonnant de funk et de rythmes afro-brésiliens. Ça se passe au Balattou, mais ça sent la consécration, le début de quelque chose de grand.