Cargo Culte : Supersonique
Musique

Cargo Culte : Supersonique

Avec Gatineau sur la glace, le rappeur Séba se retrouve au centre de Cargo Culte, un power trio complété par J-F Lemieux et Alex McMahon.

Après que des avions-cargos eurent survolé leur région pour parachuter des caisses de vivres et de médicaments, certaines tribus aborigènes de la Mélanésie ont commencé à vouer un véritable culte à ces oiseaux de fer descendus des cieux. On a prié pour leur retour. On a même construit de fausses pistes d’atterrissage pour les attirer à nouveau. Peu habitués à ce genre d’espérance, les Québécois s’apprêtent pourtant à recevoir une livraison spéciale en pleine tronche. Une caisse de laquelle sont sur le point de descendre les trois membres de la nouvelle formation rap Cargo Culte, trois poids lourds de la scène musicale montréalaise: Éric Brousseau (Séba), J-F Lemieux (basse et programmation) et Alex McMahon (batterie et programmation). «J’aime cette image, lance Brousseau. Venus de nulle part, on débarque dans le paysage musical avec notre gros rap grinçant!»

Ainsi, pour le MC découvert au sein de Gatineau, l’attente n’est plus une option. «J’ai fini de cultiver les cargos cultes. Aujourd’hui, je fonce et j’agis.» La résolution est frappante. Deux ans après la parution du deuxième disque de Gatineau, Karaoké King, Brousseau mène un nouveau projet nettement moins ludique et plus minimaliste, un croisement entre la distorsion brute de Gros Mené et l’énergie rap des Beastie Boys. Le premier album du combo, Les temps modernes, rappelle d’ailleurs la hargne de Rage Against the Machine. «Les années 1990 ont eu une grande influence sur le projet. C’est en 2011, lors du 20e anniversaire de l’album Nevermind, que j’ai eu l’idée de faire un disque rap comme si c’était Nirvana qui l’enregistrait. Je voulais quelque chose de grunge, de gras, de punk. J’avais aussi Sonic Youth en tête.»

[Écoutez Les temps modernes en entier sur voir.ca jusqu’au 30 avril]

Si Brousseau avait déjà contacté J-F Lemieux pour qu’il lui fabrique quelques beats, Alex McMahon s’est greffé au duo à sa demande. Partenaires au sein de Jedi Electro/Le Golden, McMahon et Lemieux ont vite retrouvé leur chimie. À part le fait de les initier au rap agressif de Death Grips, un point de départ pour le son Cargo Culte, Brousseau a laissé le champ libre à ses acolytes. «C’est le premier projet où j’accepte de lâcher prise sur le plan musical, confie-t-il. Quand t’as deux machines de guerre inspirées comme Lemieux et McMahon, tu les laisses travailler.»

Si des clins d’œil au printemps érable (La bandaison), au scandale de la corruption (Les temps modernes) et même à Karkwa (Champs de bataille) ponctuent le disque, la recherche d’authenticité demeure l’un des thèmes centraux. «Encore une fois, ce n’est pas étranger aux 20 ans de Nevermind. Pour moi, Kurt Cobain était un artiste en constante recherche d’intégrité et de vérité. Personnellement, j’ai arrêté de consommer pour me concentrer sur le vrai. C’est pourquoi je voulais un projet plus sincère et plus mature. Je trouve mon style moins maniéré et j’ai même rehaussé mon niveau de langue.»

La tête haute, Brousseau affiche aujourd’hui une forme étincelante. Et pour tout vous dire, l’écoute des Temps modernes confirme qu’il a toutes les raisons de se réjouir.

Les temps modernes

(La meute)

Lancement le 30 avril

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