Betty Bonifassi / Chants d'esclaves, chants d'espoir : Chansons déchaînées
Musique

Betty Bonifassi / Chants d’esclaves, chants d’espoir : Chansons déchaînées

Avec son projet Chants d’esclaves, chants d’espoir, la chanteuse Betty Bonifassi rend hommage à la soif de liberté qui anime les humains, même dans la plus cruelle des oppressions.

On se plaît souvent à croire à tort que l’esclavagisme est chose du passé. Or, bien que Betty Bonifassi ait puisé son inspiration dans des archives datant du début du vingtième siècle, la chanteuse nous rappelle que Chants d’esclaves, chants d’espoir traite avant tout d’un sujet qui est toujours d’actualité. «Il y a encore de l’esclavage aujourd’hui. Et plus la crise économique se creuse, plus il y en aura. Regardez ce qui se passe en France. Ils ont décidé d’enlever les charges à tous les patrons qui vont engager des gens au salaire minimum. C’est fini. Ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire que les gens vont être réduits à une forme d’esclavage. Et c’est ça que je sens et c’est pour ça que j’ai voulu faire ce projet. Je sens qu’il y a un retour de la prise de pouvoir sur l’humain comme main-d’œuvre et non comme humain.»

Aux dires de Bonifassi, l’idée de rendre hommage à ces chants mijotait depuis belle lurette dans son esprit. En effet, c’est alors qu’elle est âgée de 17 ans que la chanteuse fait la découverte de la bande dessinée Les passagers du vent de François Bourgeon, un récit historique traitant de l’esclavagisme.

Betty Bonifassi entreprendra alors une longue cueillette d’informations pour ensuite donner vie au projet Chants d’esclaves, chants d’espoir. «Quand j’ai commencé à découvrir cet univers-là, il n’y avait pas Internet. Il n’y avait pas cette possibilité d’aller sur YouTube et de découvrir des trucs. Au départ, j’ai donc dû faire un déplacement à Boston au Smithsonian pour aller écouter des trucs là-bas et lire des affaires. Et ensuite, vive Internet. Aussi, en 1997, les enregistrements de chants d’esclaves d’Alan Lomax sont sortis en format CD. À partir de tout ça, j’ai commencé à faire des découvertes incroyables et j’ai pu faire mon choix de chansons.»

Déjà à l’époque où Bonifassi prêtait sa voix à Champion, celle-ci intégrait des influences provenant des chants d’esclaves. Toutefois, avec son nouveau projet, ce sera davantage la musique actuelle qui s’intégrera à ces chants. Pour ce faire, l’interprète s’est entourée d’une équipe de choc en collaborant notamment avec le réalisateur et musicien Jean-François Lemieux. Le défi demeure cependant de taille, car en offrant une relecture de ces chants, il faut aussi tenir compte de ce souci constant de ne pas dénaturer pour autant les œuvres originales. «En fait, il y a un exercice de style quant aux textes qui est assez gros dans ce projet. C’est-à-dire que je ne peux pas les chanter dans la forme dans laquelle ils existent, sinon je vais finir par n’être qu’un sampling vivant. Ce que j’ai découvert dans ma recherche linguistique, c’est que tous ces chants-là, c’était une façon de se parler entre eux avec des langages secrets et des dialectes pour se raconter leur vie et continuer à mener une existence sociale. Donc moi, il a fallu que je trouve des histoires et que je recrée une forme populaire de chansons du type couplet-refrain-couplet-refrain. C’est un gros travail de ramener tout ça à aujourd’hui tout en faisant en sorte que ça reste un hommage à ces gens-là.»

L’album Chants d’esclaves, chants d’espoir devrait être offert au tout début de l’automne 2014. On retrouvera essentiellement le noyau dur de ce disque lors du concert du 25 avril au Théâtre Petit Champlain, mais selon Bonifassi, il ne s’agira pas d’un spectacle figé dans le temps. «C’est un show qui va tranquillement disparaître et renaître de ses cendres autrement. Donc ce sera intéressant d’y assister afin de voir l’approche faite par Jean-François, qui est assez "rentre-dedans". Ça va s’altérer, mais dans le bon sens du terme. Je voulais ces chansons très festives, et bien que ça ne changera pas drastiquement, il y a plusieurs pièces qui vont peut-être devenir autre chose.»

Enfin, outre Chants d’esclaves, chants d’espoir, de nombreux projets semblent déjà se profiler à l’horizon pour Betty Bonifassi. Celle-ci écrit présentement pour d’autres artistes et garde confiance en l’avenir, et ce, malgré une industrie qu’elle qualifie de plus en plus difficile. Maintenant, gageons que la chanteuse a tout le talent pour se libérer de ces chaînes.

Vendredi 25 avril à 21h au Théâtre Petit Champlain