BloguesNormand Baillargeon

Un belle sortie pour toute la famille: l’armée et la culture

Pour commémorer le 200 ème anniversaire de la Guerre de 1812, le Gouvernement canadien nous invite à participer aux nombreuses activités prévues en vue de célébrer cette part de «notre histoire et [de] notre patrimoine», qui est notamment « à la source de la création des forces armées canadiennes». Dans ce contexte, on pourra cette fin de semaine. à Montréal, participer à l’événement Armée de culture, un événement gratuit et pour toute la famille, précise-t-on.

Je soupçonne que de sales gauchistes vont rechigner et refuser de  «prendre conscience de l’apport militaire à la culture générale passée», comme on l’écrit, de cette culture que l’UNESCO définit comme «  l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social, [qui] englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. »

C’est peut-être en effet, comme le disent les organisateurs,  parce que ces gens-là connaissent peu ce«riche héritage militaire» qu’ils hésiteront à participer à ce bel événement. Je voudrais donc modestement rappeler ici quelques grands moments de rencontre de la culture et du militaire.

Quand le grand Archimède, traçant des cercles sur le sol de sable pour travailler à un problème de géométrie, est à ce point concentré qu’il n’obéit pas immédiatement au soldat Romain qui lui ordonne de dégager et que ce soldat le tue d’un coup d’épée, comment ne pas voir là un beau moment de rencontre entre ce très élevé monument de la culture humaine,  les mathématiques, et l’armée?

Quand des milices entraînées à la School of Americas tuent par milliers des gens en Amérique Latine et qu’elles laissent — je n’oublierai jamais cela, que j’ai lu dans les années 80 dans une publication des Jésuites — les cadavres de la mère et du père savamment disposés devant la tête tranchée du bébé déposée sur la table, comment  oui, comment nier qu’on est alors devant un effort louable de composer une nature morte?

L’art du cirque et la magie sont indéniablement des composantes  de la culture et l’Armée, à ce sujet, peut atteindre des sommets, Prenez cette rencontre entre la Phalanges de Franco et le poète Garcia Lorca: eh bien les militaires ont fait mieux que le meilleur des magiciens; on ne l’a jamais retrouvé, lui! La science elle aussi bénéficie de ses rencontres avec l’armée. Un corps est-il dissolvable entièrement dans l’acide? Avec Lumumba, qui a dit-on bénévolement participé à l’expérience, la CIA a cherché à le savoir.

Guernica, de Picasso il faut le dire, c’est pas mal. Mais l’original était bien mieux. Et de qui était-il, je vous prie? Eh oui.

L’armée rouge, à Kronstadt, avait auparavant réussi un véritable chef-d’oeuvre, hélas, trop méconnu.

L’armé entretient aussi, comme il se doit, des liens culturels avec la religion, Dieu étant toujours, comme le remarquait sagement Jacques Prévert, « de bonne guerre». N’a t-on pas béni la Bombe atomique lancée sur Hiroshima?

Et c’est pourquoi on comprend que tant d’écrivains, de poètes et d’artistes aient puisé dans l’armée et la guerre leur inspiration. «Le sort le plus grand , disait Charles Péguy, est encore de mourir jeune dans un combat militaire». Qui oserait le contredire?

Je pourrais continuer pendant des heures, mais je pense que mon message est clair: elles sont innombrables et d’une grande richesse les rencontres entre l’armée et la culture sous toutes ses formes.

C’est donc un rendez-vous à l’événement Armée de culture. Et n’oubliez surtout pas d’emmener les enfants!

Un seul bémol, si je peux me permettre : on peut regretter que le génocide amérindien, en lequel bien des historiens de la culture militaire voient d’ailleurs un précurseur de l’art abstrait, n’occupe pas une grande place dans le recensement des exploits qui ont rendu possible notre grand pays et tout notre continent.