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SPVM: le shérif sera en prison

Salut SPVM,

je t’écris ce soir en tant qu’ami. Oui oui. L’affaire c’est que tous les deux, on a une relation quand même idéale. Dans le genre que comme je vis à 5 heures de char de toi, on n’a jamais de comptes à se rendre vraiment. Et puis, les quelques fois où je me rends dans ta ville, ça adonne toujours qu’on n’a juste pas le temps de se voir et sais-tu, c’est peut-être mieux comme ça.

Maintenant, tu remarqueras que je me permets de te tutoyer et si je fais ça, c’est qu’en réalité, je m’adresse à chacun des individus qui te composent. En d’autres mots, je m’adresse à toi, le policier ou la policière.

Je présume que toi, ainsi que tes collègues, avez tous une histoire qui vous a mené vers ce travail. Peut-être avais-tu comme idole Don Johnson dans Miami Vice? Peut-être était-ce Dirty Harry qui t’a inspiré alors que tu n’étais qu’un gamin? Je l’ignore mais je suis à peu près certain d’une chose à propos de toi: j’imagine que tu rêvais de connaître le feeling de se sentir comme un héros, le soir en rentrant du boulot.

Alors dis-moi, est-ce que je me trompe si j’ai la conviction que, depuis plusieurs semaines, tu te sens de plus en plus comme une merde quand tu reviens du boulot? Dois-tu parfois retenir tes larmes quand en rentrant à la maison, tu regardes tes enfants et qu’à travers eux, tu revois ces jeunes dans la rue que tu terrifies en frappant sur ton bouclier? Est-ce qu’il t’arrive le soir de te refaire le film des dernières semaines et de te rendre compte que tout est parti en couilles?

Là, ne va surtout pas croire que j’essaie sournoisement de te faire feeler cheap. Je veux juste être certain que l’homme sous l’uniforme a encore un semblant de ce qu’on appelle du jugement. Parce que là, dans la tempête où tu es plongé, il est très probable que tout est de plus en plus confus pour toi et tes collègues. Et crois-moi, je te comprends. C’est ben facile de critiquer le travail des autres lorsqu’on n’est qu’un spectateur mais quand c’est toi qui est dans le feu de l’action, c’est une toute autre game.

Je te raconte tout ça parce que j’ai comme un feeling qu’il y a du monde en haut de toi qui te niaise. Tsé, on te demande d’appliquer la loi et par la force des choses, tu te ramasses à faire une job pas reluisante du tout. J’espère que tu le sais, mais tout ça aurait pu être évité depuis très longtemps. Je vais me garder une petite gêne en omettant de te dire que le gouvernement a presque souhaité tout ça, mais peu importe, ça reste que c’est toi qui est pogné pour faire la job de marde à la fin. Pendant que Jean Charest se paie un trip de Maître de jeu dans le Donjons et Dragons nature le plus ambitieux des dernières années, ta situation de simple pion est plus évidente que jamais. Ben honnêtement, si j’étais à ta place, je commencerais à être en crisse.

Pis ça, c’est sans compter que le « Donjons nature » dont tu es désormais l’antihéros a vraiment perdu de son côté légitime. Tsé, jusqu’à tout récemment, quand les joueurs se plaignaient que la game prenait une drôle de tournure, on trouvait généralement un moyen de s’arranger mais là, le Maître du jeu a tout bonnement décidé de sacrer le livre des règles du jeu à la poubelle. À la place, il s’en est écrit un vite fait, en a sorti une copie sur son imprimante et en gros, les nouvelles règles se résument pas mal à « Fermez vos gueules pis si jamais quelqu’un invente de quoi qui ne fait pas mon affaire, j’ai maintenant le droit de créer une nouvelle règle qui interdit tout ça. »

Je sais que je me répète, mais je pense que tu te fais niaiser. Entre toi et moi, parmi les victimes de la loi 78, on a beaucoup parlé des étudiants et des citoyens qui osent s’impliquer mais au cas où personne ne te l’aurait dit, tu en fais partie aussi. C’est sûr que si on ne se fie qu’aux apparences, on pourrait penser que c’est toi qui as le gros boutte du bâton mais en y réfléchissant un peu plus longtemps, c’est pas parce que tu as le pouvoir de fesser sur les autres qu’en même temps, rien n’empêche le système de t’enculer bien profond l’ami.

Honnêtement, il va bientôt falloir que vous vous parliez sérieusement entre vous, toi et tes collègues. Il est encore temps pour vous de reconsidérer le merdier dans lequel on vous a élégamment placé. Allez, ami policier, rebranche le fil qui relie tes couilles à ta tête et refuse tout bonnement d’appliquer cette loi débile qui fait de toi un symbole d’oppression. Et de toute façon, qui pourra t’arrêter après ça? Le gouvernement?

Sache que le monde est en plein changement, et peu importe les lois de merde qui tenteront de nous rendre muets, la lumière finira toujours par se frayer un chemin dans l’obscurité.

L’Histoire s’écrit à l’heure actuelle. Tu peux encore faire partie des grandes lignes.

Tu mérites certainement mieux que le rôle de l’abruti de service non?

J’en suis convaincu.

Voilà ta chance de savoir comment on se sent lorsqu’on est un héros.