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Grève étudiante, hausse des frais de scolarité : ma montée de bière

Pourquoi aborder un sujet comme la grève étudiante dans un blogue qui parle de bières? Parce que ce sujet, justement, ce n’est pas de la p’tite bière. Aussi, lorsqu’Arielle Grenier du Mouvement des étudiants socialement responsables (!) – invitée sur le plateau de Guy A. Lepage il y a quelques semaines – a dit que les étudiants pourraient absorber la hausse des frais de scolarité en coupant sur la bière… je l’ai pris un peu personnel. Je suis prêt à mettre de l’eau dans mon vin, mais pas dans ma bière!

Au fil des dernières semaines, j’ai entendu des arguments pro-hausse qui n’avaient aucun sens. Je suis personnellement prêt à écouter un argumentaire fondé, même s’il va à l’encontre de mes valeurs, mais il y a des aberrations que je ne suis pas prêt à encaisser sous le couvert des «deux côtés de la médaille». Je vous ai préparé un top 5 des pires arguments POUR la hausse.

5. Les autres provinces payent plus cher pour leurs études.

Depuis quand faut-il se fier sur les autres provinces? Pourquoi devrait-on élire un gouvernement provincial si nous pourrions simplement tous faire la même chose. Après tout, la réalité de l’Alberta, du Québec et de l’Île-du-Prince-Édouard : c’est la même maudite affaire! Si vous voulez indexer les éléments du Québec qui sont plus chers dans les autres provinces, alors il faudrait aussi baisser le prix de ceux qui sont plus chers au Québec qu’ailleurs. Tant qu’à dire des conneries…

4. Les étudiants devraient arrêter de chialer contre la hausse : ils ont droit à des prêts et bourses.

Premièrement, ce ne sont pas tous les étudiants qui ont droit à des prêts et bourses. Certains ont juste droit au prêt, certains n’ont rien du tout. À mon sens, un prêt, c’est aussi une dette. Ça ne rend pas les études plus abordables. Si je voulais, je pourrais débarquer chez Future Shop et m’acheter 10 000$ de matériel avec ma carte de crédit. Ces biens me seraient ainsi accessibles, mais pas nécessairement abordables. Il y a une nette différence entre la gratuité scolaire et l’accessibilité illusoire. Il est évident que les bourses permettent à des étudiants moins nantis de tirer leur épingle du jeu et j’en suis fort heureux. Mais il existe aussi des étudiants qui n’ont rien parce que leurs parents gagnent un salaire assez élevé, même si ces parents ne vont pas nécessairement utiliser leur argent pour aider leur enfant à étudier. De toute façon, quand on parle des prêts et bourses on passe à côté du débat. Les étudiants manifestent pour maintenir l’éducation à un prix raisonnable, pas pour râler contre les rares mesures sociales qui existent pour leur venir en aide.

3. C’est une hausse normale qui suit l’indexation du coût de la vie.

Je ne crois pas que l’éducation, comme la santé par exemple, devrait être considérée comme une dépense au même titre qu’un litre d’essence ou un pot de beurre de peanuts. Quand la Ministre Beauchamp dit qu’elle ne reculera pas parce que la hausse est une mesure prévue au budget, je n’arrive pas à la suivre. Elle prétend qu’on ne peut pas changer un budget alors qu’elle demande à tous les étudiants d’adapter le leur en fonction des caprices de son gouvernement. Si les frais de scolarité ont longtemps été gelés, c’est par choix. L’accessibilité à des études supérieures ne devrait pas être considérée comme un luxe.

2. Les étudiants devraient faire leur part comme tout le monde et arrêter de vouloir qu’on paye tout pour eux comme tous les gens de la «gau-gauche».

Mon premier réflexe serait de ne pas répondre à cet argument et de fixer le néant avec de la bave qui coule de ma bouche. Mais quand je vois tous les avantages et allègements fiscaux desquels bénéficient les gens les plus riches de la société québécoise, je n’arrive pas à comprendre comment on peut en arriver à demander aux étudiants de faire leur part. Comme si les étudiants étaient le plus gros fardeau de notre société et qu’ils parasitaient les coffres du pays comme d’insatiables sangsues. Vraiment, ça me dépasse. J’imagine que je suis juste un gauchiste qui ne comprend rien aux chiffres. Gérald Fillion, sauve mon âme!

1. Si les étudiants arrêtaient de s’acheter des iPhone, ils pourraient se permettre de payer plus cher pour leurs études.

Cet argument arrive #1 dans la liste de ceux que je ne suis plus capable d’entendre. Si c’est ça votre argument béton, je ne vous engagerais pas pour construire des viaducs. C’est absurde! C’est comme si je disais que je suis pour la peine de mort parce que certains criminels ont déjà pris des vacances dans le Sud. Un coup parti, les cartes d’autobus devraient aussi augmenter parce que plusieurs usagers ont des Nintendo Wii. Ce que les gens font avec leur argent, c’est leur affaire. Dans la réalité d’un étudiant comme dans celle du P.D.G. d’une grosse compagnie.

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Pour la petite histoire, je suis de retour aux études après avoir passé quelques années sur le marché du travail pour m’acheter des cochonneries comme un iPhone, des sushis et des bobettes griffées. J’en suis à ma dernière session (probablement à vie) et je ne serai conséquemment pas affecté par la hausse qui sera en vigueur à partir de cet automne. Mon choix d’appuyer le mouvement étudiant n’est donc pas égoïste. Je crois sincèrement que le gouvernement Charest est en train d’enfoncer ses mauvaises décisions des dernières années dans le fond de la gorge d’un groupe de la société qui aura déjà à essuyer les dettes d’une autre génération. Les québécois ont fini de faire le party et là on nous laisse les bouteilles vides pour qu’on essaie de se payer un projet de société.

En conclusion, pour vous faire oublier que ce billet n’a pas tellement rapport avec la bière, je rapplique avec Arielle Grenier et son superbe plan de couper deux bières par semaine pour se permettre des études. Moi, ce que je vous dis, c’est d’en boire deux de plus pour essayer d’oublier la facture du bilan Charest. Et gardez-en une pour pouvoir lever votre verre lorsque les étudiants auront gagné leur bataille.