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Distoriam : Critique pompette

– Critique de l’album Chapter I: Vinlanders de Distoriam –

Distoriam _ Vinelanders

C’était il y a 2 ans, le 9 février 2015, que Canal V diffusait le tout premier épisode de « Les recettes pompettes ». Pour piloter cette émission au concept douteux, on choisit sans surprise Éric Salvail, qui n’y pense pas à deux fois. En aussi peu de temps qu’il faut pour se faire une tequila suicide, il passe du plateau de tournage à la cuisine, où il se met à préparer, devant la caméra, des recettes en compagnie de personnalités connues. Parmi les people qui ont enfilé le tablier avec lui, on retrouve par exemple la comédienne Mélanie Maynard, l’humoriste Jean-Michel Anctil et l’animateur Guy A. Lepage. Mais afin d’éviter l’insipidité assurée, autant rajouter un peu de vodka à la sauce et prendre quelques shooters avant d’entamer la recette! Généralement, l’émission se termine de façon tout à fait navrante, genre Xavier Dolan complètement bourré qui raconte ses peines d’amour devant la porte du four pendant que le pâté chinois fancy est en train de cuire. Pure délice ou pire délit? Un peu des deux. Après tout, le mal peut bien avoir un goût de plaisir coupable. Alors pour combattre la niaiserie, autant le faire avec plus de niaiserie. Fight fire with fire. Ou, pour reprendre les termes d’un musicien de jazz connu : « Mon ingrédient secret pour guérir une gueule de bois : 40 onces de whiskey single malt. »

Chapter I: Vinlanders, un album pour l’occasion

C’est donc un beau soir de Saint-Jean-Baptiste 2016 qu’un de mes comparses et moi-même nous sommes réunis pour écouter le dernier opus festif du sextuor de folk métal montréalais Distoriam, Chapter I: Vinlanders, du nom des colons vikings qui avaient donné le nom de vinland ou « champ des vignes » à la région de l’Amérique du Nord, de l’Islande et du Groenland. Avec un sonomètre jaune fluo pour calculer le niveau sonore dans une main et une cannette de Stella Artois dans l’autre, nous nous sommes attaqués à l’écoute de cet album tout à fait thématique. Après tout, tant qu’à faire une critique pompette, autant le faire avec classe et intelligence. À noter qu’aucun alcool n’a été consommé durant la deuxième écoute de l’album ou durant la rédaction de cette critique. Durant la première écoute par contre…

distoriam - logo

D’emblée, je remarque qu’il a fallu baisser le niveau d’écoute de 6 dB. L’album était inécoutable autrement, mais il était très agréable à écouter à tout niveau en deçà de 76 dB. Mon compagnon de boisson, que nous surnommerons J., fait remarquer qu’il serait bien temps d’écouter l’album, vu qu’à 12 tounes totalisant 50 minutes, et au rythme où on va, on risque le coma éthylique.

Hymn to Mead

Dès l’ouverture de Hymn to Mead, je me permets d’intervenir. « C’est cool ici, l’espèce de geling-geling. » L’usage original de la mandoline ne m’a pas échappé malgré mes facultés affaiblies. J. renchérit : « Ça ressemble à la toune dans un film de Scorsese. » Effectivement, la mélodie rappelle Shipping to Boston du groupe Dropkick Murphys. L’influence de la musique folklorique irlandaise est palpable.

Duel of a Hundred Lights

Dans Duel of a Hundred Lights, les paroles sont intelligibles, fait assez rare chez les groupes de métal. J. va jusqu’à dire : « C’est impeccable. » Il tire son chapeau à l’équipe de Silverwing Studios pour leur travail de mixage sur une instrumentation aussi diversifiée : accordéon, buzuki, cornemuse, guitares, basse, voix, batterie… Ça fait pas mal de choses à mélanger! Par contre, J. et moi, en bons ivrognes, passerons toute la soirée à nous obstiner sur la balance des backs vocals, en disant que « ça sonne pas assez viking »… Consensus : nous aurions bien aimé avoir 3 dB de plus… sur la voix principale.

Steel and Steeds

J. et moi sommes vite séduits par Steel and Steeds. À ce sujet, J. est éloquent : « Oh yes. Super nice, super clean, super beau. » pendant que je m’exclame, « T’es sur ton destrier fougueux! » Visiblement, l’introduction vocale met bien la table. On se sent happé par le rythme galopant de la pièce, et pris de surprise par la modulation audacieuse. Durant le refrain, Sir Thomas Samael Friedrik Rex I se démarque par ses aptitudes vocales et un registre impressionnant.

Call to Freedom et Flaming Sails

Constatant qu’il reste 6 autres tounes, et que nous sommes pratiquement à sec, on se dit qu’il faudrait accélérer la cadence (d’écoute). J. décide de nous remonter le moral en tonnant : « Je me sens comme un pirate en ce moment. J’suis sur le pont du bateau là! » et je ne peux qu’acquiescer d’un « Moi, j’embarque! ». Décidément, Call to Freedom est très entraînante, et les breakdowns rentrent au poste. Flaming Sails contient une introduction fortement empreinte des harmonies de Dream Theater et un solo très musical. J. m’exhorte « Note-le : mad solo ». Distoriam a définitivement un don pour les mélodies accrocheuses. « L’épopée est faite. » que je laisse tomber.

Faire l’Atlantique en drakkar

En effet, c’est sur Flaming Sails, la 9e pièce de l’album, qu’on commence à remarquer une longueur. Nous rationalisons la chose en disant que « traverser l’Atlantique en drakkar, c’est long aussi, n’est-ce pas? », mais l’album aurait très bien pu se conclure là, nonobstant la qualité des trois dernières pièces. Un réarrangement de l’ordre des pièces aurait également redonné du souffle à l’album. Par exemple, l’introduction de Deadly Shores of Wasted Hope, la 11e pièce, amorce un poème musical épique plus qu’elle ne conclut un album. La chanson aurait relancé l’opus si elle avait été placée en moitié de parcours.

CONCLUSION #1

Lorsque vient le moment de se demander si l’album résistera au passage du temps, nous résumons la question ainsi : « À quel point les gens en 2050 auront envie de se prendre pour des Vikings et des pirates? » La réponse : « Plus que jamais. » En ce sens, nous étions confiants, ce soir-là, que l’album vieillirait bien.

CONCLUSION #2 (à jeun celle-là)

« Dans le vin, la vérité », disaient les Romains. Une seconde écoute (plus sobre cette fois) confirme le bien-fondé de nos premières impressions. On n’hasardera pas que Chapter I: Vinlanders sera encore écouté dans 30 ans, mais l’album n’en demeure pas moins une belle réussite, le produit de musiciens doués pour les mélodies et les refrains accrocheurs, les breakdowns pugnaces, et capables de solides performances vocales. Pour les fans de epic folk metal, Chapter I: Vinlanders sera assurément une belle écoute.