La Montagne de François Archambault : La grande messe
Scène

La Montagne de François Archambault : La grande messe

Après plusieurs tentatives d’explication, François Archambault rend les armes dans un grand rire, vaincu par l’étrangeté de sa création. «Je ne sais pas ce que le spectacle veut dire. C’est une énigme. Ça n’a pas de sens!» En dix ans d’écriture dramatique, le diplômé de l’École nationale de théâtre a couché sur papier douze pièces, reçu le Prix du Gouverneur

général pour 15 Secondes, fait couler beaucoup d’encre et récolté quelques Masques au passage. Malgré sa fulgurante ascension, le jeune auteur connu pour ses pièces réalistes ne craint pas l’expérimentation. Aujourd’hui, il explore, dans une création «sans dialogues ni histoire», les méandres de la quête de sens.

«Après avoir monté Les Gagnants, une aventure menée avec peu de moyens, j’étais épuisé. Quand, après le show, tu comptes le nombre de spectateurs touchés, tu te dis que c’est absurde… Mais, en lisant des ouvrages scientifiques, j’ai découvert une théorie du chaos qui a quelque chose de rassurant: le seul battement d’une aile de papillon peut provoquer une tornade.»

Fort de cette découverte, François Archambault a écrit «un battement d’aile» singulier, un collage de onze textes qui questionnent l’infiniment grand. «J’ai choisi de présenter La Montagne dans une petite salle [La Petite Licorne] parce que notre rapport à l’infiniment grand est tellement intime qu’il est important que l’on soit proche les uns des autres.» Bien que décrite comme une parenthèse dans son parcours, cette création ajoute une nouvelle brique à l’édifice Archambault. «Alors que dans mes autres pièces, j’essaie de donner un sens à la vie, cette fois, je me questionne: pourquoi ai-je besoin de faire cela? La forme

est différente, mais le questionnement reste le même.» Du monologue Jésus revient sur Terre (dont une version écourtée faisait partie des Contes urbains) à un «zoom in» dans la tête d’une enfant autiste, cette Montagne est mise en scène par Jean-Stéphane Roy,
interprétée par Marie-Hélène Thibault et Luc Bourgeois, et entrecoupée de sept courtes chansons du compositeur-interprète Benoît Archambault. «Ma pièce, c’est une messe pour le doute. Alors que les gens vont à l’église pour proclamer leur foi, moi, je veux rendre hommage à une croyance qui est plus grande que la foi: le doute.»

Avec cette création, François Archambault tente d’illustrer le combat qui existe entre le désir intellectuel de comprendre l’univers et l’appréhension mystique du monde. Ainsi, il joint sa voix à une réflexion sur la spiritualité et la quête de sens déjà alimentée par ses collègues Mouawad, Champagne et Cie. Selon l’auteur, le Québec de cette fin de siècle est, pour les artistes, un terreau fertile en questionnements spirituels. «On est tous autour du même objet mais on n’a pas le même point de vue. J’espère que, mises ensemble, nos pièces apportent une plus grande compréhension de la réalité.» Tel un collectionneur de papillons, François Archambault observe avec fascination les comédiens qui se débattent dans le filet tissé par sa création. «Ils font exactement ce dont il est question dans la pièce:

ils essaient de trouver le sens de quelque chose qui n’en a peut-être pas! Leur démarche m’éclaire beaucoup sur notre volonté de faire des liens, sur notre quête de sens…»

Jusqu’au 17 avril
À la Petite Licorne
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