La Dernière Audition : Faire ses classes
Scène

La Dernière Audition : Faire ses classes

Certains auteurs mêlent si habilement leurs souvenirs au fruit de leur imagination qu’il est impossible de déceler la part autobiographique que contiennent leurs ouvres. Ce n’est malheureusement pas le cas de Nicolas Sacchitelle, un jeune comédien en quête de travail qui a demandé à Benoît E. Pelletier d’écrire un solo théâtral dans lequel il interprète… un comédien désillusionné à la recherche de reconnaissance. Cas vécu à l’horizon…

Dans La Dernière Audition, Sacchitelle se glisse dans la peau de Daniel Verdun, un comédien dépressif qui sera secoué de sa torpeur par une chance inouïe: un ancien professeur lui suggérant d’auditionner pour le rôle-titre de L’Intransigeant, une très grosse production… Le jeune homme travaillera sous nos yeux son rôle d’«Alphonso» en vue de la grande épreuve, jusqu’à ce qu’il apprenne qu’un nodule risque d’endommager à jamais ses précieuses cordes vocales. Ce drame permet, selon Sacchitelle et Pelletier, d’éviter le piège du règlement de comptes en ajoutant une dimension tragique aux récriminations de leur personnage en manque de travail.
Outre cette épée de Damoclès, des marionnettes et des voix enregistrées viennent à la rescousse du jeune comédien qui se démène seul sur scène durant une heure et demie. Ce dernier s’adresse à plusieurs reprises directement au public, passant même, à la ronde un plat de sucre à la crème confectionné par sa mère. Il en offre même plus que le spectateur n’en demande en livrant un long soliloque depuis sa baignore, dans le plus simple appareil…

Ces distractions ludiques ne masquent pas le manque de consistance d’un texte banal, bourré de clichés, dont les personnages secondaires relèvent de la caricature (de la maman inquiète de son fils bohème à la copine compréhensive, en passant par le collègue snob, et le rival beau comme un dieu).

En fait, bien qu’elle soit jouée avec exaltation, cette création semble provoquer un malaise dans une salle pourtant remplie d’âmes compatissantes envers un comédien débutant qui veut à tout prix exercer un art qu’il ne maîtrise, malheureusement, pas très bien.
Le désarroi de ce diplômé en art dramatique, qui préfère tenter le tout pour le tout plutôt que de jouer le serveur pour gagner sa vie, est fort compréhensible. Malheureusement, ce n’est pas d’hier que les jeunes comédiens se bousculent aux portes des théâtres. Sacchitelle devra se rendre à l’évidence: il y a, dans ce domaine, plus d’appelés que d’élus…

Au Théâtre intime de l’Espace la Veillée
Jusqu’au 15 mai
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