Michel Faubert : L'ange gardien
Scène

Michel Faubert : L’ange gardien

Ange gardien de la mémoire collective du Québec, Michel Faubert donne vie aux légendes anciennes et réactualise la tradition orale. Avec son nouveau spectacle, le conteur se sert des mots tel un magicien. Il était une foi.

Imaginez que la fin du monde soit pour demain! Vous vous empressez de dresser une liste des choses à accomplir avant la date fatidique: faire l’amour avec la femme ou l’homme de votre vie; sillonner la planète en Concorde, se taper le meilleur des festins, réconforter vos enfants adorés… Une fois ces désirs réalisés, vous pourriez ajouter un autre souhait: qu’on vous raconte une belle (et ultime) histoire.

Heureusement, nul besoin d’anticiper le bogue planétaire pour entendre des histoires ces jours-ci. Après Le Passeur, un spectacle de contes présenté plus de 300 fois au Québec, en Europe et en Afrique, Michel Faubert relève un autre défi en s’attaquant aux légendes québécoises dans sa nouvelle création: L’âme qui sortait par la bouche du dormeur. La première a eu lieu la semaine dernière, devant une foule jeune et bigarrée réunie au Cabaret, venue chercher leur dose de chaleur humaine. Ce que le conteur a livré avec brio et professionnalisme.

Depuis une dizaine d’années, le Québec a un nouveau Félix. Certes, Michel Faubert est plus rocker, plus urbain, et beaucoup plus marginal que le barde de l’île d’Orléans. Mais le conteur est porté par une même passion des mots, et il a le don de les déposer directement dans le coeur des hommes et des femmes.

\«Les contes sont à la parole ce que la légende est au silence», expliquait Michel Faubert dans une entrevue à Voir Québec à la mi-janvier. «La légende racontée au coin du feu par un conteur, je n’y crois pas tellement. Les légendes étaient des rumeurs exactement comme le sont les légendes urbaines aujourd’hui. Aussi, arriver à en faire des récits et à les raconter devant un public, je crois que c’est beaucoup plus contemporain que le conte.»

Pour la première fois, Faubert a écrit des textes à saveur autobiographique dans lesquels se mêlent des histoires de désir, de péché (Le Prêtre fantôme; La Vendeuse de rêves, où une danseuse d’un bar de Blainville aura raison de l’innocence d’un jeune homme candide…) et de toutes sortes de diables. Ce faisant, le conteur s’éloigne un peu du folklore et du patrimoine de ses shows précédents pour inclure des événements de son passé. Il mélange les légendes collectives aux souvenirs personnels et glisse, ici et là, sur le terrain du fantastique.

Dans sa quête de modernité, ce conteur d’expérience a trouvé écho auprès des concepteurs qui ont travaillé sur L’âme qui sortait par la bouche du dormeur. Le décor et les magnifiques éclairages de Pyer Desrochers, la trame sonore de Claude Fradette et de Dominique Lanoie (les deux guitaristes sont sur la scène avec Faubert) et la mise en scène très théâtrale contribuent à donner une facture actuelle au spectacle.

Selon Faubert, les conteurs ont une déformation professionnelle qui leur fait confondre leurs souvenirs avec les histoires qu’on leur a contées: «On peut donc raconter quelque chose qui nous est arrivé de la même manière qu’on le fait depuis 300 ans», dit-il.

Devant son public qui a l’âme à la tendresse, Michel Faubert conclut par ces mots: «Le plaisir, la vie, l’amour, pis un p’tit verre, c’est toute la grâce que je vous souhaite.» Beau programme.

Les 3, 10 et 11 février
Au Cabaret
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