Les Grands Européens : Tenue de soirée
Scène

Les Grands Européens : Tenue de soirée

Les Grands Ballets Canadiens de Montréal danseront dans quelques jours un programme comprenant des oeuvres inédites, signées par les plus grands chorégraphes de ballet de notre  époque.

La dernière sortie de la saison des Grands Ballets Canadiens de Montréal (GBCM), on la doit à son ancien directeur artistique, Lawrence Rhodes, qui signe l’une de ses plus brillantes soirées. Ce n’est pas moi qui le dis, mais les maîtres de ballet de la compagnie qui en ont pourtant vu d’autres!

«Monsieur Rhodes a obtenu l’accord de ces chorégraphes après quatre années d’efforts à les inviter, les convaincre. C’est que ces chorégraphes acceptent difficilement que leurs oeuvres soient reprises à l’extérieur de leur compagnie», raconte le maître de ballet Pierre Lapointe. Ces chorégraphes, le public montréalais les connaît bien. Les ballets de Jiri Kilian et de Nacho Duato font régulièrement partie des soirées contemporaines des GBCM. La réputation de William Forsythe n’est plus à faire. Héritier de George Balanchine, cet Américain d’origine a réinventé le langage sur pointes. Il dirige depuis près de vingt ans le Ballet de Francfort.

Stéphanie Dalphond est maîtresse de ballet depuis à peine quelques mois. Cette ancienne danseuse fut désignée par Lawrence Rhodes pour être la répétitrice du ballet de William Forsythe, Approximate Sonata. Drôle de revirement pour cette femme de 24 ans qui fut mise à la porte de la compagnie, il y a trois ans, parce que sa silhouette ne correspondait pas à leurs critères esthétiques. «Mais, selon Lawrence Rhodes, je possède les qualités professionnelles pour être maîtresse de ballet. J’ai effectivement une bonne patience, une excellente mémoire et un oeil aiguisé.»

N’empêche, la tâche lui semblait énorme, compte tenu de son minuscule bagage professionnel. Comme elle adore le travail de William Forsythe – «J’espère un jour travailler pour sa compagnie» – le plaisir l’a emporté sur le stress. «L’un des assistants du chorégraphe, Noah Gelber, est venu à Montréal faire répéter la chorégraphie aux danseurs. Pendant les répétitions, je prenais des notes sur ce qu’il disait à propos des intentions chorégraphiques, de l’utilisation de l’espace, etc. Après son départ, j’avais assez d’information pour bien mener la pièce.»

Approximate Sonata se révèle la pièce la plus complexe de la soirée. Il s’agit d’une série de pas de deux variés, exécutés sur une partition de piano fragmentée du compositeur Thom Willems, dans des décors dénués. L’assistant de Forsythe a consacré plusieurs heures à enseigner le pourquoi puis le comment des mouvements. «C’est le seul ballet sur pointes de la soirée, raconte Stéphanie Dalphond. Les danseurs doivent exécuter des mouvements désarticulés, à l’opposé du langage classique qu’ils connaissent. De plus, c’est un ballet qui n’est pas construit à partir d’une musique mélodieuse; le tempo change tout le temps.»

La troupe savoure Without Words, de Nacho Duato, comme du bonbon. Depuis 1987, les GBCM ont dansé plus de cinq ballets du directeur du Ballet national d’Espagne. Une danse qui contraste avec celle de Forsythe: une profusion de gestes fluides à la limite de la désinvolture. «Depuis les débuts, c’est moi qui prends soin de ses oeuvres», confie en souriant Pierre Lapointe. «Ce fut facile de faire répéter Without Words, car j’avais l’impression d’être en terrain connu. Il y a des ressemblances avec Rassemblement et Duende, par exemple. Sauf que cette fois-ci, le langage chorégraphique est plus classique.» Selon le maître de ballet, cette danse se laisse «regarder les yeux fermés» tellement la musique de Franz Schubert, un mariage de piano et de violoncelle, berce le spectateur.

Finalement, trois compagnies de ballets seulement ont obtenu la permission de reprendre La Symphonie de Psaumes de Jiri Kilian. En règle générale, le chorégraphe hollandais assiste aux répétitions. Mais, en raison d’un agenda chargé, son assistant Hans Knill a pris la relève. «C’est important pour Jiri d’enseigner l’intention dramatique de sa chorégraphie, explique la maîtresse de ballet Monica Trogani. Ce ne sont pas tous les danseurs qui peuvent danser une oeuvre de Jiri Kilian. Les élus savent rendre l’intention dramatique de façon juste.»

La Symphonie de Psaumes est jugée par la critique européenne comme l’une des pièces maîtresses du répertoire de Kilian. La musique d’Igor Stravinski, jumelée à une gestuelle douce et rapide, invite au recueillement. Quel dommage: ce ballet comme ses précédents sera livré sur une bande enregistrée. Sinon, la soirée s’annoncerait parfaite.

Du 11 au 20 mai
Au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts

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Olé!
L’Académie Flamenca de Montréal fêtera son dixième anniversaire le vendredi 5 mai à 20 h 30 au Lion d’Or, rue Ontario Est. Pour l’occasion, elle organise une Soirée gitane à laquelle participeront la compagnie de danse Los Flamencos et Soleil tzigane, entre autres. Production Flamenco Montréal et Los Flamencos collaborent avec beaucoup de créateurs contemporains (musiciens-peintres-écrivains-scuplteurs, metteurs en scène) afin d’apporter une vision nouvelle au flamenco actuel. Info: 284-6392.
(L. Boulanger)