Le Banquet chez la Comtesse Fritouille de Gombrowicz : À table
Scène

Le Banquet chez la Comtesse Fritouille de Gombrowicz : À table

Liliana Komorowska porte à la scène un conte de Gombrowicz, Le Banquet chez la Comtesse Fritouille.

Le Théâtre Prospero clôt son Automne Gombrowicz avec un laboratoire théâtral dirigé par la comédienne polonaise Liliana Komorowska. Formée à Varsovie, l’actrice, qui habite maintenant Montréal, a participé à de nombreuses productions cinématographiques, notamment sous la direction du Québécois Christian Duguay. Impliquée dans la promotion et la diffusion de sa culture d’origine, d’abord par le biais du Festival polonais de Montréal, puis plus récemment par l’intermédiaire de sa propre fondation, l’artiste s’apprête à souligner le centenaire de la naissance de Witold Gombrowicz en transposant à la scène Le Banquet chez la Comtesse Fritouille, un conte savoureux tiré du recueil Bakakaï.

Inscrite depuis plusieurs années aux ateliers théâtraux de Warren Robertson, Komorowska a proposé à des comédiens participant à ces mêmes séances (Noël Burton, Jean Deschênes, Paule Ducharme et Jean Emery Gagnon) de prendre part à un laboratoire autour du texte de Gombrowicz. Dans ce bref récit publié en 1933 (un des premiers que signa l’écrivain), un groupe d’amis est convié chez la Comtesse Fritouille à un maigre festin, sans viande. Prêchant l’abstinence, l’hôtesse végétarienne suscite des discussions mondaines sur des sujets aussi profonds que l’Amour, la Beauté et la Pitié. D’abord fasciné par la dame et ses convives, le narrateur, un simple bourgeois que l’aristocrate invite à sa table, ira de surprise en surprise.

Parce que le texte est court et presque aussi narratif que dialogué, la metteure en scène a demandé à Dominique Garand, professeur au Département d’études littéraires de l’UQAM, spécialiste de l’œuvre de l’homme de lettres polonais et auteur du livre Portrait de l’agoniste: Witold Gombrowicz, paru chez Liber l’année dernière, d’en réaliser (avec la collaboration d’Aurelia Klimkiewicz) une adaptation destinée au théâtre. "Je n’ai pas l’habitude de ce genre de travail, affirme l’universitaire. Mais, comme je connais bien l’univers de l’auteur, j’ai accepté de relever les défis que posait cette adaptation. Ce fut un véritable work in progress, il a fallu six différentes versions. La principale difficulté était de transposer les passages réflexifs du narrateur en des dialogues qui en conserveraient l’ironie sous-jacente."

Certains se souviendront que le conte carnavalesque avait été porté à la scène en 1986 par Suzanne Lantagne, une coproduction d’Omnibus et du Pool. Vingt ans plus tard, Dominique Garand ne semble pas douter un instant de l’actualité d’un texte qui incite l’individu à confronter les valeurs dominantes afin de conserver son authenticité. "Le conte s’appuie sur un archétype qui n’est pas près de disparaître, affirme-t-il. Évidemment, les classes sociales sont plus ou moins marquées au Québec. Pourtant, il existe toujours des frontières intellectuelles que certains aspirent à franchir en adoptant les codes d’un autre milieu. Gombrowicz est un analyste exceptionnel des rapports humains. Il démontre à quel point les individus se construisent les uns par rapport aux autres, parviennent à créer de la norme en rabaissant l’autre."

Jusqu’au 27 novembre
Au Théâtre Prospero

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