Véronic DiCaire : Le facteur V
Scène

Véronic DiCaire : Le facteur V

La comète blonde Véronic DiCaire revient chez les siens, les yeux brillants, la forme étincelante et les cordes vocales grouillantes de non pas une, mais 39 voix divines.

La petite histoire a beaucoup circulé: la blonde chanteuse originaire d’Embrun, Véronic DiCaire, travaillait avec Marc Dupré à son troisième album. Ayant eu vent de ses talents d’imitatrice, le réalisateur encourageait sa comparse à lui en faire démonstration. Les sessions d’enregistrement se terminaient inévitablement en fous rires. Un coup de fil au beau-père Angélil, qui cherchait une première partie québécoise à son illustre épouse, suivi de l’envoi d’un démo, et hop là!, Marc Dupré venait d’exaucer les voeux de Boucle d’or.

Ayant oeuvré ces dernières années aussi bien à la télévision (Le Garage, Demandes spéciales) que dans des comédies musicales (Grease, Chicago), Véronic DiCaire rêvait depuis longtemps de marier ses passions pour le jeu, la danse et le chant dans un seul et même spectacle. À un point tel que son mari et gérant Rémon Boulerice – qui voyait l’industrie du disque se métamorphoser – l’avait encouragée à écrire un premier one woman show. Projet qui, au final, restera dans les tiroirs, tout comme ce troisième album d’ailleurs; la première partie ayant convaincu le clan Angélil et son équipe des Productions Feeling de coproduire son premier spectacle de variétés, mis en scène par ce même Marc Dupré.

"Je m’amuse à dire que Rémon a semé l’idée, que Marc Dupré a comme été l’engrais qui a fait pousser la patente. M. Angélil et Céline sont comme mes bâtons pour que je pousse droit!" éclate de son rire cristallin Véronic DiCaire.

Nouveaux tentacules

La comète était donc lancée et rejoignait sa nouvelle orbite. En quelques mois seulement, l’interprète de Feel Happy devait passer d’imitations pour "faire rire la famille ou les techniciens de scène" à un spectacle de deux heures de calibre professionnel. Véritable work-out de deux heures qui combine changements de costumes, danse (chorégraphies de Geneviève Dorion-Coupal), sketches (textes de Louis-Philippe Rivard) et chant, le spectacle demandait à la perfectionniste chanteuse une rigueur jusqu’alors inégalée. "Forcément, il y a une discipline qui s’installe, mais une fois que les voix ont été placées, j’ai pu me laisser aller avec elles, m’amuser vraiment."

Cette assurance n’a pas toujours dominé la Franco-Ontarienne qui a fait ses premières armes au concours Ontario Pop. Elle se remémore un souper de filles dans la foulée de ses collaborations à Demandes spéciales (TVA), à Revue et corrigée 2006 (Théâtre du Rideau vert) et à la tournée 5 Women Show. "J’avais fondu en larmes en disant: "Les gens m’engagent parce que je suis drôle et je ne sais pas si je veux être drôle!" C’était vraiment un épisode loufoque à la Macha Limonchik. Je riais et pleurais en même temps."

Elle poursuit: "Le titre de chanteuse franco-ontarienne était tellement ancré dans ma tête. Je me disais que je devais faire des albums à tout prix et j’avais de la difficulté à m’abandonner à d’autres projets qui m’en faisaient déroger. À partir du moment où j’ai accepté mes nouveaux "tentacules", j’ai eu du plaisir."

Le deuil a été de courte durée: "Le fait de bifurquer sur ton autoroute pour prendre une autre direction entraîne toujours des inquiétudes. Marc est arrivé à point nommé. Quand il m’a confirmé la première partie de Céline Dion, j’ai pris une petite journée de congé. Je me suis fait une petite cérémonie seule chez moi. J’ai mis mes textes de chansons du troisième album dans un beau cartable en pensant y revenir peut-être un jour. Je ne suis pas du genre à m’éterniser. Go, on passe à autre chose!"

Cordes sensibles

Déjà exercée aux imitations des Céline Dion, Marie Carmen et Vanessa Paradis qui ornaient autrefois les murs de sa chambre, Véronic DiCaire devait piger d’autres noms dans le grand chapeau des interprètes féminines. "On ne voulait pas tomber dans la nostalgie ou le old fashion. On voulait que ce soit le plus actuel possible et qu’il y en ait pour tout le monde. Donc on passe de Fabienne Thibeault et Édith Piaf à Britney Spears et Fergie."

Certaines candidates se sont révélées plus ardues à imiter que d’autres. "Il y a des voix que je ne pensais jamais aimer faire tellement elles m’ont donné du fil à retordre! Marie-Chantal Toupin, my God, j’ai eu de la misère! Mais maintenant que j’y suis arrivée, je m’amuse comme une folle à la faire!"

Il y a aussi ces divas qui touchent des cordes plus sensibles. "J’ai eu un beau moment à trouver la voix d’Édith Piaf. Il y a quelque chose qui me touche beaucoup chez elle", révèle celle qui s’amusait, gamine, à imiter la Rose-Aimée Dupuis de Pauline Martin (Samedi de rire) dans la cour de récréation.

Les voix masculines ne se sont pas encore taillé une place parmi les 39 voix féminines, mais Véronic DiCaire n’exclut pas cette éventualité. "Il y a plusieurs voix qui m’intéressent, comme celle de Pierre Lapointe. Un jour, j’haïrais pas ça, un petit bloc de voix de gars. Ce serait un beau défi!"

Et si son troisième album aux saveurs country-folk l’amenait à proposer ses propres compositions, elle poursuit dans cette veine en habillant son spectacle d’anecdotes personnelles. Ainsi, la maîtresse de cérémonie lie ses numéros chantés avec des sketches à personnages, mais aussi avec des monologues de stand up inspirés de sa vie: elle raconte une expérience dans un camping country (où interviennent Renée Martel et Isabelle Boulay), elle dévoile ce qui se trouve dans son iPod, etc.

Bien que le terme humoriste soit encore source d’inconfort chez la chanteuse-imitatrice, elle se réjouit tout de même de sa nomination dans la catégorie Découverte de l’année au Gala des Olivier. "C’est un nouveau chapeau que je dois assumer. J’ai le plus grand respect pour les humoristes. Ça demande beaucoup de discipline, je révise mes textes avant tous mes spectacles", note celle qui se dit inspirée par les polyvalentes Tina Fey, Bette Midler ou Barbra Streisand.

Et comme pour toute héroïne à la volonté de fer à qui tout arrive à force d’efforts, elle récolte à 32 ans le succès rêvé. Sa tournée – qui multiplie les supplémentaires – pourrait s’échelonner sur deux, voire trois années, après quoi on a des visées pour la France et Las Vegas. "Je m’amuse à répéter que j’ai gardé le même bateau; j’ai ajouté quelques voiles et quelques membres d’équipage sont montés à son bord, et j’ai pris un nouveau cap. Et effectivement, on a un bon vent dans les voiles. Ça va vite!"

À voir si vous aimez / André-Philippe Gagnon, Claudine Mercier, Bette Midler