Kanata, une histoire renversée : Passeur d'histoire
Scène

Kanata, une histoire renversée : Passeur d’histoire

Le Loup bleu, qui a fait d’un théâtre de marionnettes où se côtoient désinvolture et intelligence du propos sa marque de commerce, opère un retour attendu sur les planches de la Bordée.

Avec Kanata, une histoire renversée, ce sera à l’histoire du Canada que se frotteront le Théâtre du Sous-marin jaune et son directeur artistique, qui nous ont habitués à l’orchestration loufoque d’oeuvres majeures de la littérature, voire de récits fondateurs comme la Bible. Pour la première fois, c’est cependant d’un auteur vivant et extérieur à la troupe, Jean-Frédéric Messier, que vient la proposition de départ. Hors de sa zone de confort, le Loup bleu?

Pour Antoine Laprise, l’un des deux metteurs en scène, la démarche, toujours guidée par un même désir de transmission, n’a pas changé: "Nous sommes toujours partis d’un texte non théâtral. Ici, rien ne change. En fait, nous n’avons en rien désobéi aux règles que nous ne nous sommes jamais données."

Jacques Laroche, qui partage la mise en scène, note néanmoins l’aspect particulier du nouveau projet: "C’est la fois où on est le plus impliqués dans le propos. En revisitant notre passé, on s’adresse aux gens de façon plus intime, on explore une zone où chacun possède des références: ça va toucher des racines, ça va aller réveiller des choses. D’autant plus que notre histoire a été falsifiée…"

Dans l’intention de permettre une vision plus globale de notre identité et de faire contrepoids aux récits dominants, la pièce explorera des facettes méconnues – voire tues – de notre passé. Pour Antoine Laprise, Kanata se présente ainsi comme une "histoire renversée", celle de plusieurs peuples et de leurs langues qu’on a subsumés dans un raccourci de pensée sous le terme Amérindien.

Première de deux parties, la pièce naviguera de l’arrivée de Cartier à la Grande Paix de Montréal, en montrant la vie des premiers habitants telle qu’elle se modifiait avec l’arrivée des colons. "Davantage que le propos critique, on se concentre d’abord sur l’aspect narratif. On raconte quelque chose, les 200 premières années du contact entre les Blancs et les Amérindiens."

Reste que choisir une façon de raconter l’histoire, c’est toujours politique, comme le souligne Jacques Laroche: "En 2011, il est temps de réaliser que nos aïeux, ce sont aussi les Amérindiens. C’est quand même aberrant qu’on soit incapable de dire bonjour et merci en innu, alors qu’on y arrive en espagnol, en allemand et en anglais. Il faudrait revendiquer davantage notre côté métis, reconnaître toute l’influence des Indiens sur notre mode de vie, sur notre survie même. En fait, ces sociétés-là ont permis que la nôtre existe, ni plus, ni moins."