Bilan Arts de la scène 2014 : Spectacles en crise
On emballe 2014: La langue rapaillée, idées cadeaux et coups de cœur

Bilan Arts de la scène 2014 : Spectacles en crise

Controverse autour des annulations de spectacles et renouveau dans plusieurs directions artistiques: 2014 aura été une année agitée en arts de la scène. Retour en arrière.

C’était en février. Alors que les représentations de six spectacles étaient annulées par manque de fonds, le brûlant chorégraphe Dave St-Pierre exprimait son ras-le-bol et proposait une sorte de grève du spectacle vivant, créant un débat dont les braises continuent de crépiter. L’affaire a permis de mettre en lumière une réalité connue, mais finalement assez peu discutée: de trop nombreux spectacles sont joués à Montréal sans que le budget nécessaire ait été réuni par la production. Sur nos scènes, la plupart du temps, on voit des spectacles portés à bout de bras par des compagnies qui ne font pas leurs frais et qui poursuivent le travail malgré les trous dans le budget, quitte à se passer de salaire et à sous-payer les comédiens. Il faut que le théâtre existe dans la cité, coûte que coûte, se disent-ils sans doute, et qu’il soit porté par la passion davantage que par la raison.

«Je crois que chaque artiste qui n’a pas les moyens suffisants pour créer ou remonter un spectacle devrait annuler, disait Dave St-Pierre. Ça lancerait un message clair aux subventionneurs et au gouvernement.» De nombreux artistes de théâtre et de danse y ont réagi en affirmant qu’il est insensé de pénaliser le public et qu’une vague d’annulations n’aurait sans doute pas l’effet escompté. Mais la discussion sur le sous-financement chronique des arts de la scène et sur les barrières à la tournée (notamment internationale) se poursuit. Le cas du spectacle La fureur de ce que je pense, annulé au Carrefour international de théâtre de Québec et empêché de tourner en France à cause d’un manque de 120 000$ au budget décor, en est emblématique.

Autrement, 2014 aura été l’année d’un renouveau attendu aux directions artistiques de certains théâtres institutionnels. Le réputé metteur en scène Claude Poissant a pris la barre du Théâtre Denise-Pelletier (on découvrira en 2015 le contenu de sa première saison), succédant à Pierre Rousseau qui y avait officié pendant 20 ans. Au Centre du Théâtre d’Aujourd‘hui (qui a retrouvé son ancienne appellation), Sylvain Bélanger prend ses aises et programme dans la grande salle de jeunes artistes comme Mani Soleymanlou et Sébastien Dodge, qu’on n’y aurait peut-être pas trouvés sous l’ancien directorat. À l’Espace Libre, Philippe Ducros a cédé les rênes à Geoffrey Gaquère, qui a promis d’«être à l’affût de l’imaginaire, de la beauté, de la parole réinventée, de l’exploration et du risque». Finalement, au terme d’une édition très relevée du Festival TransAmériques, sa fondatrice Marie-Hélène Falcon a reçu les applaudissements nourris du public et des milieux de la danse et du théâtre, quittant son festival en pleine gloire et passant le flambeau à Martin Faucher. Il en est le successeur naturel et le choix fut assez unanimement approuvé.

Au Gala des Cochons d’or, en juin, le jury de jeunes artistes a d’ailleurs souligné ce vent de fraîcheur en remettant aux nouveaux directeurs artistiques le prix du Cochon lumineux. Ils ont aussi profité de leur temps de parole pour rappeler aux nouveaux directeurs artistiques qu’ils ont tout intérêt à ne pas s’empoussiérer dans leurs nouveaux postes et à savoir passer le flambeau au moment opportun.

Une manière comme une autre de dénoncer les longs directorats artistiques, jugés trop propices à la sclérose artistique. Certains ont d’ailleurs beaucoup spéculé en mars, alors que Lorraine Pintal, qui dirige le TNM depuis 22 ans, a annoncé se lancer dans la course électorale en portant les couleurs du PQ dans Verdun. Celle qui a toujours dit vouloir rester à la tête de son théâtre au moins jusqu’en 2017 n’a finalement pas été élue dans une élection qui a couronné le Parti libéral et plongé le Québec dans les ténèbres de l’austérité. On pourra donc revivre les débats sur la succession de Lorraine Pintal au TNM dans quelques années…

Il y eut en 2014 de grands disparus. Les actrices Françoise Graton et Catherine Bégin nous ont quittés, ainsi que l’homme de théâtre Paul Buissonneau et le grand comique Gilles Latulippe. Qu’ils reposent en paix.

 

À LIRE AUSSI:

Notre TOP 3 Théâtre
Notre TOP 3 Danse
Notre TOP 5 Théâtre international
Notre TOP 3 Danse internationale