Du sexe à Berlin / Entrevue avec Sylvianne Rivest-Beauséjour au sujet de sa pièce Chaloupe
Scène

Du sexe à Berlin / Entrevue avec Sylvianne Rivest-Beauséjour au sujet de sa pièce Chaloupe

Sylvianne Rivest-Beauséjour profite de Zone Homa pour présenter un laboratoire de création autour de son texte Chaloupe, qui raconte la quête du lieu idéal en croisant les langues et les sexes. Conversation.

Comédienne montréalaise s’étant entichée de Berlin, Sylvianne Rivest-Beauséjour est une amoureuse des lieux et des langues. Être là-bas, à multiplier les plaisirs, l’a ramenée très frontalement ici, dans un questionnement sur l’appartenance. C’est entre autres ce que raconte Chaloupe, en prenant le chemin d’une sexualité vive mais aussi en suivant les traces de Raymond Depardon et des réflexions sur l’errance que son travail inspire.

«L’errance n’est ni le voyage ni la promenade», écrivait Olivier Verdun au sujet des photos de Depardon. «C’est cette expérience du monde qui renvoie à une question essentielle: qu’est-ce que je fais là? Pourquoi ici plutôt qu’ailleurs? Comment vivre le plus longtemps possible dans le présent, c’est-à-dire être heureux ? Comment se regarder, s’accepter? Qu’est-ce que je suis, qu’est-ce que je vaux, quel est mon regard?»

Sur scène avec les comédiens Jean-René Moisan et Benoît Mauffette, dans une mise en scène de Steve Gagnon, l’auteure expérimente en quelque sorte ce questionnement en évoluant dans une temporalité disloquée, dans «un temps flottant», en «racontant à distance».

«Depardon, poursuit-elle, parle aussi de la capacité des errants à l’émerveillement et à cultiver le moment présent.  J’essaie de toucher à ça à travers le rapport à la sexualité du personnage. C’est une sexualité qui pourrait paraître pornographique mais en fait on y plonge de manière profonde, tentant de toucher ce qui est pur dans ses actes sexuels clichés, d’y voir la beauté profonde. La sexualité amène le personnage à découvrir son véritable lieu d’appartenance et à se questionner sur la langue et le lieu auxquels elle appartient. Il y a du sexe avec un Québécois, frère de lac et de banc de neige, qui lui rappelle ses racines, sa langue, son rapport à la nature. Il y a du sexe avec un Allemand, qui représente la communication avec l’étranger, un autre rapport à la notion d’appartenance.»

 

«Tu m’as aspergée de toi chaud / Tapissée de blanc / Et tu m’as lessivée de ta langue

Le sexe, dans Chaloupe, est raconté un peu cru, du moins jamais évoqué par euphémismes. Mais ses sensations puissantes s’incarnent dans une langue poétique. «On perçoit souvent la sexualité féminine comme quelque chose de très romancé, de très lié à la quête d’un idéal amoureux. Je renverse complètement ça. Dans mon texte, la sexualité arrive plus vite que la sentimentalité. C’est une sexualité très sauvage, mais elle est vécue comme un révélateur, comme une émotion brute, véritable profonde. C’est une sexualité crue mais pas trash, une sexualité hyper-assumée mais aussi hyper-vulnérable.»

Chaloupe est présenté le 15 août à 20h à la Maison de la culture Maisonneuve, en programme double avec Fleuriste, de Maxime René de Cotret.
Dans le cadre de Zone Homa.