Société

Droit de cité : La langue de chez nous

C’était prévisible au point d’en être inévitable, mais on s’en étonne quand même chaque fois que cela arrive. C’est comme les mannes, les rhumes et les retours de Jacques Parizeau.

Au Québec, tout est linguistique. Le gouvernement élaborerait une politique de la patate que, de part et d’autre de l’autoroute Décarie, on se disputerait son caractère français, dénoncerait son bilinguisme officiel ou exigerait le droit inaliénable pour les patates de pousser en anglais. «Elle n’est pas moins anglophone parce que french fries», clamerait l’ami Bill Johnson.

Alors, pas étonnant que sur la question de la fusion des municipalités de l’île de Montréal, c’est à ce niveau existentiel que les Montréalais sont invités à s’élever par des membres du gouvernement du Québec, avant de procéder à une île/une ville.

Une ville de Montréal étendue à la grandeur de l’île compterait 53 % de francos _ donc, 47 % d’anglos et d’allos. Paraît qu’il y aurait des gens au Parti québécois qui s’inquiéteraient de l’avenir du français dans un Montréal fusionné. On ne sait pas précisément qui, parce qu’ils se tiennent bien cois devant les caméras.

Mais bon, on n’a pas besoin de savoir qui, au PQ, s’inquiète de l’avenir du français à Montréal. L’important, c’est qu’il y en ait. Après tout, n’est-ce pas pour cette raison qu’on les élit périodiquement à l’Assemblée nationale? Pour qu’ils s’inquiètent à notre place, pendant que nous vaquons à plus important?

Tout de même, songez-y et faites vos calculs: dans le statu quo, il y a 47 % d’anglos sur l’île. Après une fusion, il en aurait 47 %.

Le Nouveau-Montréal ainsi fusionné compterait-il: A) pas assez; B) assez; C) trop d’anglophones, par rapport à l’ancien?

Refaites le calcul, mais de manière métropolitaine. La grande région métropolitaine de Montréal compte actuellement 68,4 % de francophones. Après la fusion des villes de l’île-centre, il y en aurait 68,4 %.

Hmmmm… C’est un pensez-y bien.

One Way
Guy Bouthilier, de la Société Saint-Jean-Baptiste, ne se cache pas d’avoir vu, dans l’inquiétude des Québécois face à l’anglicisation d’un Nouveau-Montréal, une raison indiscutable de faire la souveraineté. Cela n’étonne pas, puisque si Guy Bouthilier savait que le soleil se lève toujours à l’est, il y verrait un signe céleste de notre destin vers l’indépendance.

Il y a aussi Robert Libman, ancien chef du Parti Égalité et maire de Côte-Saint-Luc, qui livre un combat sans merci au gouvernement pour que Cavendish Blvd. ne devienne pas boul. Cavendish Blvd.

Si Côte-Saint-Luc était fusionnée à Montréal, il n’y aurait pas de problème: Cavendish se prendrait en français, sans intervention de l’OLF. Actuellement, par contre, Côte-Saint-Luc ne veut rien savoir du bilinguisme, et l’OLF doit traîner la Ville récalcitrante devant les tribunaux et écrire un nouveau chapitre dans le psychodrame linguistique canadien.

Gagez-vous qu’en bout de ligne, on va laisser Cavendish se faire prendre en anglais anyway afin de ne pas faire de tort à l’image du Québec à l’étranger?
C’est ben pour dire…

South Part
Vous voulez un microcosme de ce que serait Montréal dans une île/une ville? Venez aux bureaux de Communications Voir. On y trouve la majorité francophone de Voir et la minorité anglophone de Hour réparties sur des unités géographiques distinctes, mais administrées par la même autorité.

Ainsi, nous avons notre West Island, dans le coin de Hour, mais, compte tenu de l’orientation nord-sud de nos bureaux, il s’agit plutôt du South Office, ou encore de South Part, avec le rédac en chef de Hour dans le rôle de Kenny.

Jusqu’à maintenant, la présence d’une forte minorité d’anglophones sous la même administration n’a pas eu d’effets sur la langue parlée des ordinateurs de la compagnie. Ils se répondent toujours en binaire. «0-1-1-0-0-1-0».

Revers de l’histoire
Z’avez entendu le ministre Robert Perreault, député de Mercier, dénoncer le «déficit démocratique» à la Ville de Montréal, lundi? Bon, d’accord, on se fait tous du sang de punaise avec lui.

Mais savez-vous pourquoi les citoyens de sa circonscription n’ont pas un mot à dire sur les changements de zonage, comme le déplore le ministre? Parce que le comité exécutif de la Ville auquel siégeait monsieur Perreault, en 1986, a troqué le droit des citoyens de faire des référendums locaux sur ces questions, contre des comités de consultation. Lesquels ont tous été vidés de leurs pouvoirs par l’administration Bourque, à sa simple discrétion, grâce à la porte laissée grande ouverte par l’équipe dont le ministre était membre à l’époque.

C’est ben pour dire, bis…