Le Réseau Enfants Retour : Au revoir, les enfants
Société

Le Réseau Enfants Retour : Au revoir, les enfants

En 1985, la disparition du petit Maurice Viens, puis la découverte de son corps, a consterné le Québec. Mais, paradoxalement, la tragédie a mis au monde un solide réseau de solidarité qui a permis de retrouver cent soixante-dix-huit enfants disparus en quinze ans.

Copié sur le modèle canadien-anglais Child Find, établi dans chacune des provinces, le Réseau Enfants Retour a depuis tissé une solide toile d’araignée qui s’étend partout en Amérique et en Europe. Susan Armstrong, qui était directrice de la garderie de l’ONF au moment de la disparition de Maurice, et Marcelle Gamache ont été chamboulées par la tragédie. L’électrochoc les a poussées à fonder Enfants Retour.

L’organisme est devenu un incontournable dans le paysage, avec ses deux cent cinquante bénévoles. Les parents dont un rejeton a disparu s’y retrouvent tels des paroissiens sur le perron de l’église. «Je parle souvent à la mère de Jolène Riendeau, on se téléphone mutuellement quand on a besoin de parler à quelqu’un», dit Liliane Cyr, dont la fille a disparu il y a vingt-deux ans. Jolène, dix ans, de Pointe-Saint-Charles, n’a pas été revue depuis le 12 avril 1999. Jusqu’à présent, les informations sont parvenues aux policiers au compte-gouttes, et aucune n’a permis de mener à une piste sérieuse qui permettrait de la retrouver. Sa disparition demeure un mystère. «Je lui répète que je crois que sa fille est vivante, qu’elle a peut-être pris le bord des États-Unis avec un étranger.»

Enfants Retour n’est pas un cabinet de détectives. L’organisme travaille plutôt de concert avec la GRC (et Interpol), la Sûreté du Québec, les policiers municipaux, les douanes, les Affaires étrangères, etc., sous le parapluie de l’organisation Nos enfants disparus. «Notre aide est technique, explique Patrick Bergeron, directeur de la recherche. Le terrain de l’enquête, c’est d’abord aux policiers d’y être.»

Dès qu’une disparition d’enfant est signalée, la machine du Réseau Enfants Retour démarre: coordination des bénévoles qui assisteront les policiers dans les recherches; alerte des médias pour diffuser la photo du disparu; création des affiches qui tapisseront la ville dans les restos, les bars, les stations-service, les dépanneurs et tutti quanti; soutien psychologique à la famille. On prend contact ausi avec des émissions comme Unsolved Mysteries

Mais une fois l’urgence des premiers jours cruciaux passée, que le mystère s’épaissit, comme dans les cas récents de Jolène Riendeau et de Julie Surprenant, qu’aucune information ne permet à la police d’élaborer quelque hypothèse, le Réseau prend le relais des policiers auprès des parents. «Quand les policiers annoncent qu’ils cessent la recherche active, faute d’informations qui permettraient de faire avancer l’enquête, c’est la pire chose que les parents puissent entendre. Nous soutenons non seulement leur moral, mais aussi leurs démarches personnelles. Souvent, lorsqu’ils obtiennent des informations additionnelles, ils se sentent plus à l’aise de les communiquer d’abord à un organisme humanitaire comme le nôtre plutôt qu’à la police. Notre mot d’ordre, même si c’est cliché, c’est l’espoir. Il faut toujours garder l’espoir.»

Liliane Cyr ne garde pas un bon souvenir de ses contacts avec les policiers, il y a vingt-deux ans. Mais depuis, les choses ont changé, juge Patrick Bergeron. «Nous donnons de la formation professionnelle aux détectives du SPCUM, afin qu’ils soient plus sensibles aux particularités de ce type d’enquêtes.»

Le 25 mai est la Journée internationale des enfants disparus, un événement qui a vu le jour en 1988, une idée de… Ronald Reagan! À Montréal, le Réseau Enfants Retour invite les parents, leurs enfants et le public en général à une vigile à la chandelle qui se tiendra à 19 h 30 à l’église St. Gabriel, rue Centre, dans le quartier Pointe-Saint-Charles. Contes et musique animeront la soirée.


STATISTIQUES

Enlèvements par un étranger
Canada: 52
Québec: 11

Accidents (Exemple: on croit que l’enfant est disparu, mais quelques jours plus tard, on découvre qu’il a été victime d’un accident.)
Canada: 38
Québec: 4

Égarés
Canada: 496
Québec: 19

Rapts parentaux
Canada: 358
Québec: 61

Fugues
Canada: 47 585
Québec: 6651

Inconnu
Canaa: 9884
Québec: 1 202

Autres
Canada: 1947
Québec: 322

Source: Centre d’information de la police canadienne (CIPC) (1999)