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Signé : citoyenne se débattant contre la morosité

déprimeC’en a été assez pour moi. Je me suis décidé à écrire à Vincent Marissal suite à son « La machine Lisée ». Je me débats pour garder la tête hors de la mare de morosité ambiante vis à vis la politique et donc, nos politiciens. Je me raccroche pour ne pas sombrer comme la majorité des personnes qui m’entourent. Cette fois, c’est le blogue de Jean-François Lisée et ses coulisses du pouvoir, ses coudées franches, son audace, ses réflexions qui me tiennent la tête hors de l’eau. Sa façon de ne pas baisser les yeux quand il interpelle, ni les bras. Il croit fort, il parle haut et fort. Il croit pour 1,000 mais demande à 1,000 de croire avec lui. Et si c’était un rassembleur, celui qu’on attend depuis quelque temps ? Peut-être que non, non plus, l’avenir le dira mais présentement, il est à la ligne de départ. On se doute bien que tous les prétendants à la chefferie ne sont pas encore alignés, alors j’ai eu le goût de demander à monsieur Marissal : « s’il vous plait, pouvez-vous les laisser prendre un élan avant de leur tirer dans les jambes » ?

boitelettre-interrogationMonsieur Vincent Marissal,

Aujourd’hui, j’arrête tout pour m’adresser à vous quelques minutes.

J’ai 60 ans, un secondaire V, et comme une bonne majorité de Québécois, je frôle le désabusement vis-à-vis la politique. Je dis « frôler » car régulièrement, je me redresse, me répétant que c’est important. Je fais un effort pour garder la tête sortie du marécage. Parce que moi, contrairement à vous, je ne suis pas payée pour regarder la scène politique.

Je suis loin de celle qui fait à cent pour cent ses devoirs, lisant et écoutant tout de la chose politique. Mais au moins, ces derniers mois, un blogue m’a aidé à relever les bras en ces heures où j’ai eu le goût de les baisser et c’est celui de Jean-François Lisée. Ce n’est pas que je veuille vous le vendre comme étant la meilleure sauce pour relever le goût de votre salade, c’est que votre billet m’a rendu perplexe. Faut dire qu’il tombe justement à un moment où je réfléchis au sort que l’on réserve à nos politiciens.

Du temps où Lisée exerçait son métier de journaliste, il était estimé pour son intégrité, on saluait son foisonnement d’idées, on reconnaissait son esprit d’analyse, réalisant qu’il écrivait plus vite que son ombre. Cet apanage apparaissait comme des qualités. Parce qu’elle s’approche du pouvoir, les qualités se teintent d’un filtre grisâtre. Pourtant, on parle du même homme. Il n’y a pas de baguette qui transforme un être aussitôt qu’il tâte la chose politique. Le pouvoir n’est pas cet enfer où les ailes grésillent aussitôt qu’on s’en approche de trop près. Cela ferait un peu judéo-chrétien, vous ne trouvez pas ?

diable-angéliqueJ’ai poussé ma réflexion en supposant que moi, Venise Landry, semi retraitée consacrant 25 heures par semaine à titre bénévole pour la promotion de la littérature québécoise, je me présente pour briguer un poste en politique, est-ce que du jour au lendemain mes qualités se transformeraient en défauts ?

Jean-François Lisée a interpelé le support de monsieur et madame tout le monde et moi, simple citoyenne, je suis interpelé qu’un député veuille brasser la cage de la morosité. Je le vois comme une personne qui veut sortir les électeurs de leur état de « spectateur » qu’ils deviennent des « acteurs ». Pour vous, c’est de la stratégie à l’état pur, c’est habile, point. Pas l’ombre du doute sur l’authenticité de l’intention. Et si monsieur Lisée croyait « vrai »ment à l’union fait la force ? Et si c’était un rassembleur de nature ? Ce rassembleur qu’on réclame tant.

J’ai été surprise de réaliser parmi vos propos qu’un homme qui tienne à ses idées se transforme en être buté. Je fais allusion à ses convictions sur la charte assez fortes pour qu’il pense démissionner. S’il en avait été autrement, s’il s’était laissé assimiler ou bâillonner, vous auriez crié à de la mollesse, rajoutant même que les politiciens sont tous pareils se laissant assimiler par la « ligne du parti ».  Qu’il ait osé tenir à ses idées se retourne contre lui. Si je comprends bien, quoiqu’il fasse, il est condamné à l’avance. Pourtant qui pourra tenir à ses idées, si lui n’y tient pas ? Quel chef serait-il s’il ne tenait pas aux idées qui naissent de ses réflexions ? Sous votre prose, qu’il écrive beaucoup, qu’il s’ouvre sur les coulisses du pouvoir apparait comme un défaut. Je tenais à vous dire combien je préfère une personne qui nous en dit trop que pas assez. C’est ainsi que pense le citoyen moyen, je voulais que vous le sachiez.

Jean-François Lisée a toujours eu des idées, même avant de s’approcher du pouvoir, car plus il réfléchit et plus il écrit. Il s’inspire des personnes qui l’entourent et de l’actualité qui se transforme d’heure en heure. Même si vous précisez qu’on ne peut reprocher à une personne d’avoir trop d’idées, votre texte le contredit. La citoyenne a beaucoup apprécié ce blogue qui nous dévoilait ses journées de ministre, aucun autre politicien n’a pris la peine de s’acquitter de cet exercice astreignant. C’est s’exposer à la critique que cette tribune interactive où chacun met son holà et son grain de sel.  Si vous l’aviez lu dans son intégralité, vous auriez une idée plus claire de l’individu. Un dialogue s’est progressivement installé entre le lecteur et le ministre. Et de là, la confiance est née.

J’aurais aimé que vous souligniez que monsieur Lisée n’a pas peur de faire peur avec la nouveauté. De parler de passeport et de monnaie, d’annoncer déjà ses couleurs, par souci de transparence est remarquable. Bien entendu que ses idées vont faire peur à certains, mais il ne les cache pas pour aller chercher des votes tièdes. Il est direct, va droit au but. C’est son style et cela a toujours été son style, avant de frayer avec le pouvoir autant qu’après.

Sous votre plume, le fait qu’il lance plusieurs idées (bistros pour les jeunes), il ratisse large. Vous savez, on n’est pas si bête, on entend votre sous-texte qui suggère qu’il ratisse « trop » large, suggérant qu’il a du temps à perdre.lettre-pigeonSi je prends la peine de vous écrire aujourd’hui, c’est pour vous demander si votre rôle d’analyste politique ne pourrait pas englober, en ces temps de morosité, de donner une chance aux coureurs. En autant que vous le puissiez bien entendu. Je suis à deux poils de conclure que ce n’est pas la masse silencieuse qui est désabusée mais plutôt les analystes politiques qui ont la tribune et le micro pour parler haut et fort. Si vous sortiez au moins quelques points positifs, cela n’aiderait-il pas ? Si vous me dites que vous ne pouvez pas faire autrement parce que vous les observez de près, eh bien, je m’enfonce encore plus profondément dans ma mare de morosité. À moins que voyez leurs forces de plus près et pas uniquement leurs faiblesses. Moi, la citoyenne, je n’ai pas le choix de les observer de loin. Le gros bon sens dit que c’est impossible que toutes les personnes qui s’approchent de la politique se mutent au point que leurs forces de jadis se transforment en faiblesses. Le rôle que j’attends d’un analyste que j’aime écouter et lire n’est pas de rouler à sens unique. Je commente la littérature québécoise et pour moi critiquer exige de faire ressortir les qualités des défauts, allant jusqu’à mettre en relief la différence entre les deux.  C’est ultra simpliste de penser qu’une personne qui s’approche du pouvoir perds toutes ses qualités, je me bats contre ce genre de dérision.

Une raison est venue à mon esprit sur le pourquoi vous penchiez vers la tendance du dénigrement et j’espère que je me trompe. Si vous trouviez et décriviez des qualités d’un candidat à la chefferie, est-ce que vous vous exposeriez à vous faire accuser de favoritisme ? Pourtant, si on s’y arrête le moindrement, faire l’exercice contraire au favoritisme, défavoriser un candidat, c’est également prendre un parti. Et en ce sens-là, « La Machine Lisée » ne donne pas beaucoup d’humanité à l’homme. Si c’est ce que vous avez voulu, c’est réussi.

ligne départ

Je le répète, je m’attendais à ce que vous ne tiriez pas sur les jambes d’un ex-collègue encore sur la ligne de départ, surtout que le coup d’envoi n’est même pas encore donné, mais j’imagine que vous avez vos raisons. Par contre, ne soyez pas surpris de constater ensuite que le citoyen ne croit plus à ses politiciens. Et si vos collègues se plaignent que la course manque de piquant et de sang neuf, et d’idées, je vous en prie, interrogez-vous au moins une minute sur votre part de responsabilité face à ce désenchantement collectif. Ou deux minutes.