Vie

Ritz-Carlton : Cure de jouvence

À une époque où la conservation du patrimoine se pose en principe de base de l’architecture contemporaine, le projet de rénovation de l’hôtel Ritz-Carlton Montréal nous propose un nouvel exemple de reconversion patrimoniale.

LA GRANDE DAME

Celui qu’on surnomme la Grande Dame est le seul hôtel canadien de luxe de son époque encore en activité aujourd’hui. C’est même le premier au monde à porter la double désignation de Ritz et de Carlton, noms des deux plus prestigieux hôtels du siècle dernier, respectivement de Paris et de Londres. Il fut construit, en 1912, par la firme d’architectes new-yorkaise Warren & Wetmore (à qui l’on doit le Grand Central Terminal de New York), au coeur du "Golden Square Mile", où se concentrait, vers 1900, l’élite montréalaise (et donc, canadienne). Il nous offre aujourd’hui un exemple précieux d’un style architectural qui en fait toute la valeur patrimoniale. En effet, le contraste entre un extérieur d’une sévérité géométrique et un intérieur aux formes plus légères s’inspire directement de l’architecture néoclassique des frères Adam, inventeurs du style pompéien au XVIIIe siècle.

UNE MISE À NIVEAU NÉCESSAIRE

Pour maintenir le Ritz-Carlton au niveau d’excellence exigé dans l’hôtellerie de luxe, il était devenu essentiel de rénover l’édifice en profondeur. "Notre intention est de faire de la Grande Dame de la rue Sherbrooke l’hôtel le plus prestigieux de Montréal et du Canada", déclarait Solly S. Lawi, président du conseil d’administration de l’hôtel. Un investissement de 100 millions de dollars permettra d’améliorer le confort des chambres et d’agrandir le bâtiment pour aménager des résidences de prestige, comme c’est la tendance à Montréal ces temps-ci (cf. le Crystal, premier hôtel-résidence du Canada, inauguré cette année, et le projet du complexe Westin sur la rue Saint-Antoine).

Pourtant, l’important était de procéder à ces transformations, sans gâcher le caractère de l’immeuble.

UNE ENVELOPPE D’ACIER ET DE VERRE

Le projet de rénovation: un bel exemple de reconversion patrimoniale.

Si les architectes de Provencher Roy + associés ont décidé de conserver la façade de l’édifice ainsi que les parties communes (Foyer, Cour des Palmiers, Salon Ovale et jardin), ils ont en revanche choisi une signature très contemporaine pour l’ajout d’un étage supplémentaire, au-dessus de l’édifice patrimonial, et d’une nouvelle aile sur la façade ouest. La Grande Dame se verra ainsi coiffée d’une structure de verre et d’acier. L’idée est effectivement résolument contemporaine et s’inspire d’ailleurs, comme l’a souligné Claude Provencher, architecte du projet, d’exemples prestigieux, comme la pyramide du Louvre ou la coupole du Reichstag. Néanmoins, à la différence de Pei et Foster, la firme montréalaise n’a pas voulu trancher avec la géométrie du bâtiment d’origine. La nouvelle architecture reprendra donc simplement les lignes classiques de l’ancienne. Certains pourront alors peut-être regretter qu’il n’ait pas été possible de proposer des formes plus originales, voire allégoriques pour alléger la rigueur du style de la façade de l’hôtel et mieux en souligner le caractère unique. Au moins, pourrons-nous nous réjouir avec Claude Provencher de ce que ce choix soit "conforme aux principes de la Charte Internationale Sur la Conservation et la Restauration des Monuments et des Sites et aux recommandations formulées dans l’étude patrimoniale du Ritz-Carlton Montréal supervisée par M. Jean-Claude Marsan (ancien doyen de la Faculté de l’aménagement de l’Université de Montréal)."