Vie

État d’urgence : Copains clopant

Avec son "manifestival" artistique et social, l’Action terroriste socialement acceptable (ATSA) décrète l’État d’urgence au centre-ville!

Du bowling extrême, un parcours théâtral, un "banquet cochon", de la musique, des films, des conférences. C’est l’urgence, donc ça déborde… d’activités! Pendant cinq jours, la place Émilie-Gamelin prendra la forme d’un véritable camp de réfugiés pour sans-abri. Vêtements chauds, bonne bouffe à profusion et lits douillets: pour un itinérant, c’est la totale! Mais le grand public n’est pas en reste pour autant. Car si le rendez-vous convie les mal-logés à une séance de dorlotage bien méritée, les mieux nantis, eux, sont appelés à assister à une copieuse programmation artistique. Et comme dans bien des situations d’urgence, l’heure sera à la solidarité. Chaque activité ou manifestation artistique encouragera la mixité et la découverte de l’autre. Le but n’étant pas d’aller observer des itinérants en action, mais plutôt de faire ce que l’ATSA appelle du "compagnonnage citoyen". Pour une fois, laissez donc vos peurs et vos préjugés au placard…

LAISSEZ-VOUS GUIDER

Si, lors des éditions antérieures, l’événement se confinait à la partie béton de la place Émilie-Gamelin, cette année, on s’étend. L’espace gazonné et le trottoir du boulevard De Maisonneuve sont pris d’assaut. Affolé à l’idée de vous perdre dans le camp? Bonne nouvelle, la huitième édition de ce festival engagé propose des visites guidées. Elles sont offertes par des étudiants en animation culturelle de l’UQAM et sont fortement suggérées. Étant ouverts à tous, ces petits tours guidés permettent de se balader à la fois avec Monsieur Métro-boulot-dodo et Monsieur Bouche-de-métro. Deux réalités, un seul trajet: moment singulier propice à la solidarité.

En ayant un guide, vous allez en apprendre sur l’ATSA, sur État d’urgence, mais aussi sur les artistes sur place. Parmi eux, le coloré Armand Vaillancourt – fidèle "urgentologue" – qui créera pendant toute la durée de l’événement une oeuvre en direct, au vu et au su de tous. Également au camp, l’excentrique Claudine Cotton, qui offrira des performances ludiques. Respirer, trimbaler, répandre sont ses trois mots d’ordre. Son but? Provoquer des situations inusitées de rencontres.

La visite vous mènera aussi vers les Habitations nomades. Une expo de tentes et abris temporaires conçus pour la vie vagabonde des sans-abri. Ces oeuvres – certaines symboliques, d’autres pragmatiques – ont été commandées par l’organisme Folie/Culture à huit artistes et architectes. Il en résulte d’étonnantes propositions esthétiques. Si vous vous sentez à l’étroit dans votre 3 1/2, ça remettra peut-être les choses en perspective. Quant à l’itinérant, les Habitations nomades seront pour lui un véritable Salon de l’habitation.

Parlant salon, il y a aura aussi un salon de quilles sur les lieux: le Free Bowl. Créé par l’artiste vancouvérois Michael Coolidge, ce dernier propose un terrain extrême, avec des obstacles et des bosses. Une rumeur raconte qu’il y aura même un tournoi… Une chose est claire, si l’on se fie aux matchs de ping-pong de l’an dernier, il y a fort à parier que ces joutes seront de pures parties de rire.

À CHACUN SON ACTIVITÉ

Les chefs Martin Picard et Normand Laprise concoctent la grande bouffe d’État d’urgence.
photo: Martin Savoie

On a beau vouloir provoquer des rencontres, il reste que certaines activités s’adressent plus spécifiquement à l’un ou l’autre des "clans". C’est le cas du parcours théâtral Entre la chute et l’envol. Présentée par la troupe Mise au jeu, la pièce s’adresse aux gens qui ne connaissent pas la rue. Ils la découvriront lors d’une promenade de 45 minutes, pendant laquelle on racontera des histoires d’hommes et de femmes qui ont vu leur vie basculer, vers le bas.

Pendant que les néophytes arpenteront les rues, environ 250 sans-logis endurcis seront conviés au grand festin gastronomique annuel, le fameux Banquet cochon. Encore une fois cette année, Martin Picard du Pied de Cochon, Normand Laprise du Toqué!, Mostafa Rougaibi de La Colombe et Elena Faita de l’école de cuisine Mezza Luna seront aux fourneaux. Vous voulez faire partie de la grande bouffe? Commanditez une table et partagez votre repas en compagnie des clients privilégiés de la soirée. Sinon, laissez votre place à un sans-abri, pour qu’il en apprenne aussi sur votre réalité.

UN PEU DE CHANGE, S.V.P.

C’est d’ailleurs une excellente idée que de commanditer une table: État d’urgence est dans le rouge de 15 000 $. Si vous n’avez pas les 500 $ qu’il en coûte pour la table, commanditez une assiette – 50 $. Vous pouvez aussi acheter une tuque à l’effigie de l’événement – chaude et mignonne -, ou encore faire un don directement à l’ATSA: 514 844-9830. www.atsa.qc.ca

État d’urgence
Du 21 au 25 novembre
Place Émilie-Gamelin