Vie

Les femmes à la chasse : Chasseuse sachant chasser

La chasse est un sport qui demande patience, précision et concentration. Trois mots qui en disent long sur la prédisposition des femmes à exceller dans un créneau majoritairement masculin. Mais si les hommes vont à la chasse, les femmes prennent leur place!

Délicate et lumineuse, Katherine Domingue n’a pas exactement la tête de l’emploi du chasseur typique. Il faut pourtant lui attribuer le cadavre d’un ours noir sur l’une de ses photos de profil sur Facebook. La jeune femme de 22 ans est passionnée de chasse et pêche. « Je me suis longtemps demandé si je ferais carrière dans le milieu faunique. Finalement, j’ai choisi de travailler en coordination à la télévision. Au fond, ç’aurait été sensiblement le même genre de travail, avec toute la paperasse pour les permis », ironise-t-elle.

Comment développe-t-on une telle passion? En se faisant offrir une certification autorisant le port d’armes sous la supervision d’un adulte. « Dès que j’ai eu l’âge légal, mon père m’a emmenée dans le champ de tir et j’ai appris à arranger le cadavre d’une bête. On a six armes enregistrées, dont une carabine qui a appartenu à la mère d’un ami de la famille, originaire du Wyoming. C’est avec cette arme que j’ai abattu mon premier caribou. »

Histoire de chasse

Katherine ne s’en cache pas, grâce aux contacts de son père qui travaille dans le milieu des pourvoiries, elle profite de belles occasions de chasse. « La première fois que j’ai chassé, c’était à Kuujjuaq, un super voyage en mini-avion, au milieu de nulle part dans la toundra. » De quoi donner envie de répéter l’expérience, un peu plus au sud cette fois, à Chibougamau, pour la chasse à l’ours. « C’était vraiment particulier. Tu es assise seule dans ta cache, tu ne dois absolument pas bouger, tu dois prendre un savon spécial pour ne pas attirer l’odorat de l’ours, etc. Il y a des centaines de mouches qui te tournent autour, mais tu ne dois pas broncher. »

Et elle n’a pas bronché quand un ours est apparu, huit heures plus tard. Elle a même attendu une demi-heure avant de tirer, pour s’assurer qu’elle avait la bonne position. Mais ce n’est pas le trophée de chasse qui semble allumer le plus notre interlocutrice. « Ce genre d’aventure repousse tes limites. Tu ne fais qu’un avec la nature, tu dois être extrêmement concentrée, mais ça te permet de voir les choses tellement différemment. »

Le cercle des chasseuses

De la Sépaq à la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs(FQCP), nombreuses sont les organisations permettant aux femmes de se familiariser avec cette activité. Selon les statistiques de la FQCP, le pourcentage de femmes inscrites au cours d’initiation à la chasse avec arme à feu est passé de 18,5% en 2002 à 24% en 2010. Depuis le début de l’année 2011, 3451 femmes ont suivi la formation sur un total de 14 005 participants.

Pour celles qui n’ont pas la chance d’avoir un papa chasseur pour les initier, il existe plusieurs programmes, dont Fauniquement femme Remington qui propose un séjour de chasse et pêche à la pourvoirie la Seigneurie du Triton en Mauricie. Hélène Larente a pour sa part mis sur pied le programme Cerfemmeen Outaouais, qui initie chaque année un groupe de quatre femmes aux plaisirs de la chasse au cerf. « Il faudrait que chaque région développe un programme semblable, plus intime et complémentaire à celui de Fauniquement femme », pense la coordonnatrice.

Pour plusieurs, l’avantage d’être entre femmes pour une première chasse est de ne pas sentir la pression ou le jugement des plus expérimentés. « Les chasseuses attendent habituellement plus longtemps avant de tirer sur leur proie, tandis que les hommes sont plus pressés. Si une femme choisit de ne pas tirer parce qu’elle n’est pas sûre de son coup, elle sera respectée dans le groupe », explique Hélène Larente. De plus, en suivant ces formations pour lesquelles le matériel est fourni, les participantes peuvent vérifier leur intérêt avant de s’aventurer dans les grosses dépenses pour l’équipement.

La peau de l’ours

C’est bien beau, l’aventure au grand air, mais la partie de chasse ne se termine pas après un coup de fusil. Il faut pouvoir disposer du gibier. Au moment d’écrire ces lignes, l’ours qu’a abattu Katherine Domingue repose toujours dans son congélateur, en attente d’une visite chez le boucher. La jeune femme ne se nourrit d’ailleurs que de viande sauvage. La peau de l’ours, elle, est chez le taxidermiste – autre dépense assez importante; la bête finira empaillée sur le mur du salon. Quant à l’excédent, Katherine songe à aller faire un tour à l’atelier-boutique Harricana, pour voir si sa prise ne pourrait pas se transformer en accessoire mode. Avouez qu’à la question: « Où as-tu pris ton sac? », il est plutôt rare de se faire répondre: « Dans le bois à Chibougamau! »

Adresses /

Sépaq: www.sepaq.com

Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs: www.fedecp.com

Fauniquement femme Remington: www.fedecp.com/index.php/evenements/fauniquement-femme-remington

Cerfemme – Hélène Larente: 613 586-9356, [email protected]