Les fantaisies de chaud pain

Un centre-ville de Sherbrooke sans boulangerie? C’est la morose réalité avec laquelle il fallait composer depuis la fermeture de La Brioche pralinée, qui a régalé flâneurs et travailleurs pendant quelques précieuses et mémorables années avant de soudainement tirer sa révérence, laissant dans le désarroi tous ceux pour qui il n’était plus question d’aller acheter une baguette ailleurs que rue Frontenac. Bien instruit du trou béant laissé dans le cœur des gourmands, trou béant qui minait également la vitalité du centre-ville, Commerce Sherbrooke approchait en octobre dernier Claude Éminet et sa femme Véronique (35 ans de mariage et d’amour, les amis!) en leur proposant de transporter leurs fours dans la Reine, la rumeur du bon pain qu’ils mitonnaient à la boulangerie La Feuillantine de Stanstead étant parvenue jusqu’aux oreilles toujours bien tendues de l’organisme. Une fructueuse tentative de débauchage dont les Sherbrookois ne se plaindront certainement pas. La Feuillantine s’installait donc à Sherbrooke il y a quelques semaines, dans le même local que celui jadis occupé par La Brioche, belle occasion pour les propriétaires de sortir de leurs cartons cet amusant, voire coquin, jeu de mots: Les Fantaisies de chaud pain. «C’était le nom de notre boulangerie en Provence et on y a toujours été particulièrement attaché», explique monsieur Éminet qui s’est établi au pays en 2006 pour d’abord ouvrir les portes d’une boulangerie à Québec avant de s’installer en Estrie. «On aime beaucoup bourlinguer», confirme-t-il avec le sourire.

Preuve de la criante demande qui pesait sur l’estomac des habitués du centre-ville, les présentoirs sont presque vides lorsque nous passons, par un début d’après-midi de milieu de semaine. Ne restent que quelques généreux et alléchants croquemonsieurs, tranches paysannes, quiches, sandwichs et focaccias. «Les gens des différents bureaux ont rapidement repris l’habitude de venir prendre un truc pour emporter le midi», se réjouit le cousin.

Parmi les plus grandes fiertés des Fantaisies de chaud pain, on compte la Banette, une baguette française au levain d’appellation d’origine contrôlée – «la baguette la plus vendue en France», insiste Véronique –, qui se fraie tranquillement un chemin au Québec (encore très peu de boulangeries ont obtenu l’approbation de la maison Banette pour la mitonner). Également offerts: pain au kamut, au millet, au quinoa, à l’épeautre, au seigle, que des produits confectionnés sans sucre et sans gras avec des farines 100% bios.

Côté pâtisseries, monsieur Éminet s’abreuve largement à la grande tradition française (éclairs, choux, flans, millefeuilles), sans s’empêcher d’instiller un brin de folie dans ses douceurs (on pense à la crème brûlée à la lavande).

Alors, rassurez-nous, Claude et Véronique: nous pouvons nous attacher aux Fantaisies de chaud pain sans craindre que vous ne quittiez pour de plus vertes contrées dans quelques années? «Oui, nous sommes ici pour de bon», assurent-ils en échangeant un regard complice.

Les Fantaisies de chaud pain

139, rue Frontenac, Sherbrooke

819 791-8334