Hambar, Tapeo, Mesón, Primi Piatti : L'art de recevoir
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Hambar, Tapeo, Mesón, Primi Piatti : L’art de recevoir

C’est bien connu, quand il est question d’impression, tout se joue dans les premières minutes.

Lorsque vient le temps de juger d’un restaurant, l’accueil qu’on y reçoit et la manière dont on y est traité sont fondamentaux. On a tous déjà eu la fâcheuse impression d’importuner ses hôtes, d’avoir à marcher sur la pointe des pieds de peur de déranger et, comble du désagrément, de se sentir expédié vers la sortie aussitôt la facture réglée. Parallèlement, on a aussi tous en tête des établissements où le terme «bienvenue» prend tout son sens et où on se plaît à retourner encore et encore parce qu’on s’y sent tout simplement bien. Les propriétaires de ces précieux lieux ont le don inestimable de nous mettre instantanément à l’aise, et leur plaisir à nous recevoir est palpable. Rencontre avec trois d’entre eux.

Victor Afonso du Tapeo et du Mesón dans Villeray

Le restaurant Tapeo a une renommée qui transcende les frontières, et depuis avril dernier, son petit frère Mesón a déjà acquis le titre de resto de quartier. À quoi doit-on de tels succès? À la qualité et à l’originalité de leurs menus ibériques, certes, mais aussi à leurs propriétaires Victor Afonso et Sébastien Muniz, qui y sont pour beaucoup. Victor nous explique: «Après dix ans, on commence vraiment à connaître nos clients. On sait quelles petites attentions vont leur faire plaisir, quels sont leurs drinks favoris… Bien qu’il faille tout de même garder une certaine distance, puisqu’il s’agit d’une relation d’affaires, on entretient des rapports très spéciaux avec notre clientèle, de belles amitiés. On s’intéresse à eux, on fait des suivis de nos conversations passées, on prend des nouvelles de leur entourage. Ce n’est même pas un effort, ça nous vient naturellement.»

Alors, comment font-ils pour partager leur temps entre leurs deux bébés? Ils procèdent par garde partagée, alternant l’un et l’autre entre les deux restos, une semaine sur deux. Il leur est primordial que l’un d’eux assure le rôle de maître d’hôtel sur le plancher chaque soir. Ainsi, on est pratiquement toujours assuré d’être accueilli à la porte par l’un ou l’autre, qu’on soit au Tapeo ou au Mesón. «Quand vous recevez quelqu’un à la maison, c’est vous qui lui ouvrez la porte et le saluez lorsqu’il s’en va. On veut recréer la même expérience ici.» Tout aussi important pour eux: le fait d’être à l’écoute de leurs clients, comme le témoigne cet épisode raconté par Victor: «Deux dames sont venues me voir à la fin de leur repas pour me dire que bien qu’elles avaient été bien servies et qu’elles avaient bien mangé, elles m’avaient trouvé très froid à l’accueil. Elles avaient raison, j’étais stressé à la porte ce soir-là et il était inacceptable de leur avoir fait sentir… Je les ai invitées à venir bruncher au resto le lendemain, et depuis, elles sont devenues de bonnes amies de la maison.» Comme quoi, la critique constructive est appréciée des propriétaires impliqués et peut même comporter ses avantages!

Marco Marques du Primi Piatti à Saint-Lambert

Depuis qu’il l’a pris en main en 2008, Marco Marques a hissé le Primi Piatti au rang des meilleures tables de la Rive-Sud. «Ici, tout le monde se connaît. C’est très chaleureux, on accueille les clients en les embrassant et en leur faisant des accolades. Je sais quelles tables ils préfèrent et je m’assure de leur attribuer. Leurs enfants peuvent jouer à leur guise, l’ambiance familiale est l’une de nos grandes forces», affirme-t-il avec fierté. À force de se promener entre les tables pour parler aux gens, Marco a fini par connaître leurs goûts: «On n’hésite jamais à substituer les accompagnements ou à proposer des produits qui ne sont pas sur le menu, comme des mini-burgers ou des lobster rolls, pour accommoder. Si on a les ingrédients pour le faire, on ne va jamais dire non!»

Sur les sept jours d’ouverture, Marco y est six. Sans compter la ligne téléphonique du resto qui est connectée à la sienne afin qu’il puisse répondre lorsqu’il n’y a personne sur place. Ici, pas de boîte vocale répétant machinalement de rappeler durant les heures de service pour faire une réservation. Dévoué, vous dites? Dévoué, et aussi généreux: «Presque tous les clients se voient offrir quelque chose lors de leur visite. Que ce soit un plateau de charcuteries, un apéro en attendant que leur place soit prête, une bouteille de bulles pour fêter un anniversaire…» Ce genre d’attentions, qui sont à peine discernables dans les recettes finales, font toute la différence dans l’expérience du client et sont presque à tout coup garantes de fidélisation.

Philippe Poitras du Hambar dans le Vieux-Montréal

Ayant déjà songé à devenir architecte – c’est d’ailleurs à lui qu’on doit beaucoup des éléments épurés et chaleureux du décor –, Philippe Poitras est tombé amoureux du vin lors d’un voyage en Bourgogne et est plutôt devenu sommelier. C’est à ce moment qu’il a rencontré Martin Picard, trois mois après l’ouverture d’un certain Pied de cochon. «J’ai été au PDC pendant dix ans, j’y ai monté la carte et la cave à vin à partir de zéro. Après ça, j’ai décidé de voler de mes propres ailes et de lancer mon projet à moi.»

Même si le Hambar diffère certainement du Pied, il est évident que Philippe a gardé le même esprit de service et l’influence de son approche client: «Je suis convaincu que lorsqu’on va dans un restaurant, les choses dont on va le plus se souvenir sont l’accueil qu’on a reçu lors de son arrivée et la manière dont on a été salué à son départ. Toute l’expérience passe vraiment par là; se faire appeler par son nom, se faire serrer la main… On veut que les clients qui sont déjà venus ici sentent qu’ils rentrent à la maison et que la première impression des nouveaux venus soit d’être accueillis avec chaleur et avec le sourire, non pas comme des numéros avec un signe d’argent sur la tête.» Autre règle d’or de la maison: on n’y refuse absolument personne: «Notre politique veut que si des gens arrivent alors que le resto est plein, on va toujours leur trouver une place, que ce soit des habitués ou des nouveaux clients. Ils peuvent prendre un verre debout au bar avec un plateau de charcuteries, sachant qu’ils vont éventuellement être assis, c’est rassurant pour eux. Il y a toujours moyen de faire une petite place, et en plus, ça met de la vie dans le restaurant!»